Mesures de prévention préalables à l’intervention
La démarche de prévention des risques d’interférence doit être mise en œuvre avant l’intervention de l’entreprise extérieure. En pratique, la démarche peut être amorcée dès lors que l’entreprise utilisatrice décide de recourir à une entreprise extérieure et détermine ses besoins.
Il est conseillé à l’entreprise utilisatrice de prévoir dès le stade de la négociation du contrat avec l’entreprise extérieure, des éléments qui favoriseront par la suite la démarche de prévention. Ainsi, la recommandation R474 de la Cnamts (adoptée par le Comité technique national des industries de la métallurgie le 20 mai 2014 et par le Comité technique national des industries de la chimie, du caoutchouc et de la plasturgie le 13 mai 2014) recommande d’intégrer :
- les consignes générales de sécurité,
- les dispositions réglementaires particulières à appliquer en matière de santé et de sécurité,
- la procédure d’accueil des intervenants,
- les formations spécifiques nécessaires,
- l’expression des besoins concernant les tenues et équipements de protection individuelle,
- etc.
Au fil des années dans certains domaines, comme la maintenance, les entreprises extérieures ont pu acquérir des connaissances théoriques et pratiques propres à leur domaine d’intervention. Il peut ainsi être opportun de les associer le plus en amont possible, dans le cadre de la rédaction d’un cahier des charges complet, au choix des mesures de prévention.
La recommandation R429 (adoptée par le Comité technique national de la chimie, du caoutchouc et de la plasturgie le 21 novembre 2006) préconise également de prévoir contractuellement la réception des travaux réalisés, notamment afin de transmettre formellement l’ensemble des informations utiles à entreprise utilisatrice et, par exemple, de s’assurer de l’absence de risque au démarrage ou redémarrage des installations consignées.
L’ensemble des mesures de prévention préalables à l’intervention doit être repris lorsqu’une entreprise extérieure a recours à de nouveaux sous-traitants après le début de l’opération.
Inspection commune préalable
Réalisation de la visite (art. R. 4512-2 et R. 4512-3 du Code du travail)
L’entreprise utilisatrice doit faire procéder, préalablement à l’exécution de l’opération, à une inspection commune :
- des lieux de travail,
- des installations qui s’y trouvent,
- des matériels éventuellement mis à disposition des entreprises extérieures.
Toutes les entreprises, sous-traitants compris, concourant à l’exécution d’une même opération doivent participer simultanément à l’inspection commune préalable afin d’assurer leurs informations réciproques.
Acteurs de la visite commune préalable
La circulaire DRT n° 93-14 du 18 mars 1993 précise que la visite commune préalable doit être réalisée, pour chacune des entreprises, avec l’employeur lui-même ou avec des agents dotés d’une délégation de pouvoir valide (c’est-à-dire possédant les moyens, les compétences et l’autorité suffisants).
Durant l’inspection, le chef de l’entreprise utilisatrice doit également :
- délimiter le secteur de l’intervention des entreprises extérieures,
- matérialiser les zones de ce secteur qui peuvent présenter des dangers pour les travailleurs,
- indiquer les voies de circulation que pourront emprunter les travailleurs ainsi que les véhicules et engins de toute nature appartenant aux entreprises extérieures,
- définir les voies d’accès des travailleurs aux locaux et installations à l’usage des EE (notamment les installations sanitaires, vestiaires collectifs et locaux de restauration).
L’inspection commune doit être réalisée à une date proche des travaux et doit être rigoureuse (Cass. Crim., 12 nov. 2008, pourvoi n° 08-80681).
L’inspection commune préalable doit être réalisée avant l’établissement du plan de prévention pour chaque opération. Cette obligation ne peut pas être écartée, par exemple, au motif que :
- l’entreprise extérieure est un fournisseur de l’entreprise utilisatrice depuis de nombreuses années et qu’elle connait parfaitement les lieux (Cass. crim., 30 avril 2002, pourvoi n° 01-85652)
- l’entreprise extérieure souhaitait se dispenser de la visite préalable (Cass. crim., 14 octobre 2003, pourvoi n° 02-86376).
Échange d’informations préalable (art. R. 4512-4 et R. 4512-5 du Code du travail)
Les employeurs doivent se communiquer toutes les informations nécessaires à la prévention des risques (notamment la description des travaux à accomplir, des matériels utilisés et des modes opératoires dès lors qu’ils ont une incidence sur la santé et la sécurité). La circulaire DRT n° 93-14 du 18 mars 1993 précise qu’il peut s’agir d’informations relatives à la fiche de données de sécurité de produits utilisés sur le site de l’entreprise utilisatrice. On peut également envisager la transmission de titres d’habilitation, CACES, etc.
L’entreprises utilisatrice communique aux entreprises extérieures ses consignes de sécurité applicables aux travailleurs chargés d’exécuter l’opération, y compris durant leur déplacement.
Réalisation et mise en œuvre du plan de prévention
Élaboration commune du plan de prévention (art. R. 4512-6 CT)
Au vu des informations et des éléments recueillis lors de l’inspection commune préalable des lieux de travail, les employeurs analysent ensemble les risques pouvant résulter de l’interférence entre les activités, les installations et les matériels. Ils doivent ainsi, avant le début des travaux, établir un plan qui définit les mesures de prévention devant être prises par chaque entreprise en vue de prévenir les risques identifiés. Ces différentes mesures doivent être cohérentes entre elles et ne pas engendrer de nouveaux risques.
Le plan de prévention ne pourra donc être pertinent et opérationnel que si l’évaluation des risques lors de la visite commune préalable a été convenablement menée.
Contenu du plan de prévention (art. R. 4512-8, R. 4512-9, R. 4512-10 et R. 4512-11 du Code du travail)
A minima, les points suivants doivent obligatoirement figurer dans le plan de prévention :
- la définition des phases d'activité dangereuses et des moyens de prévention spécifiques correspondants,
- l'adaptation des matériels, installations et dispositifs à la nature des opérations à réaliser ainsi que la définition de leurs conditions d'entretien,
- les instructions à donner aux travailleurs,
- l'organisation mise en place pour assurer les premiers secours en cas d'urgence et la description du dispositif mis en place à cet effet par l’entreprise utilisatrice
- les conditions de la participation des travailleurs d'une entreprise aux travaux réalisés par une autre en vue d'assurer la coordination nécessaire au maintien de la sécurité et, notamment, de l'organisation du commandement (vise les cas de sous-traitance),
- la répartition des charges d'entretien entre les entreprises extérieures dont les travailleurs utilisent installations sanitaires, vestiaires collectifs et locaux de restauration et mis à disposition par l’entreprise utilisatrice.
Il s’agit d’une liste non exhaustive, qui doit être complétée et élargie afin de tenir compte des risques propres à l’opération envisagée.
De plus, doivent être joints au plan de prévention :
- la liste fournie par chaque entreprise des postes occupés par les travailleurs susceptibles de relever du suivi individuel renforcé en raison des risques liés aux travaux réalisés dans l’EU
- les dossiers techniques regroupant les informations relatives à la recherche et à l’identification des matériaux contenant de l’amiante ou, le cas échéant, le rapport de repérage de l’amiante.
Des documents particuliers doivent être annexés au plan de prévention (article R. 4462-5 du Code du travail) lorsque les travailleurs d’une entreprise extérieure réalisent :
- une activité pyrotechnique sur le site d’une entreprise utilisatrice,
- une activité non pyrotechnique dans une installation pyrotechnique d’une entreprise utilisatrice.
Obligation d’élaborer un plan de prévention écrit dans certains cas (art. R. 4512-7 et R. 4512-12 du Code du travail)
Le plan de prévention doit obligatoirement être réalisé à l’écrit :
- dès lors que l'opération à réaliser par les entreprises extérieures, y compris les entreprises sous-traitantes auxquelles elles peuvent faire appel, représente un nombre total d'heures de travail prévisible égal au moins à 400 heures sur une période inférieure ou égale à douze mois, que les travaux soient continus ou discontinus. Il en est de même dès lors qu'il apparaît, en cours d'exécution des travaux, que le nombre d'heures de travail doit atteindre 400 heures.
- quelle que soit la durée prévisible de l'opération, lorsque les travaux à accomplir sont au nombre des travaux dangereux figurant sur une liste fixée par un arrêté du 19 mars 1993 (pour les établissements agricole, cette liste est fixée par un arrêté du 10 mai 1994) : travaux exposant à des rayonnements ionisants, à des agents biologiques pathogènes, à des risques de noyade, à un risque d'ensevelissement….
Le seuil des 400 heures est calculé en additionnant l’ensemble des contrats conclus pour la réalisation d’une même opération et non pas entreprise extérieure par entreprise extérieure.
Il est recommandé de réaliser systématiquement les plans de prévention à l’écrit, quand bien même l’opération envisagée ne relève pas des deux situations prévues par le Code du travail.
Lorsque le plan de prévention écrit est réglementairement exigé, il doit être tenu, pendant toute la durée des travaux, à disposition :
- de l’inspection du travail,
- des agents de prévention des organismes de sécurité sociale (Carsat, Cramif, CGSS),
- de l’organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP).
Le chef de l’entreprise utilisatrice doit également avertir l’inspection du travail de l’ouverture des travaux.
Mise à jour du plan de prévention
Le plan de prévention n’a pas de durée de validité réglementairement prévue (contrairement au document unique qui, lui, doit être revu au minimum chaque année). Il a vocation à s’appliquer aussi longtemps que doit durer l’opération. Il est donc évolutif. Ainsi, à chaque fois que nécessaire, les entreprises doivent veiller à l’actualiser afin de tenir compte des évolutions et de la situation réelle de travail. Dès lors que de nouveaux salariés sont amenés à intervenir dans le cadre de l’opération, que de nouvelles installations ou de nouveaux équipements sont utilisés, le plan de prévention doit être revu et modifié.
Mise en œuvre du plan de prévention
Pour tenir compte des réalités pratiques et des spécificités de certaines interventions, les employeurs peuvent s’inspirer de la démarche proposée par la recommandation R474 de la Cnamts (adoptée par le Comité technique national des industries de la métallurgie le 20 mai 2014 et par le Comité technique national des industries de la chimie, du caoutchouc et de la plasturgie le 13 mai 2014), prévoyant la réalisation d’un plan de prévention en deux parties :
- une première partie s’appliquant à toutes les interventions,
- une seconde partie spécifique à chaque intervention.
Cette démarche est particulièrement adaptée aux opérations répétitives, souvent régies par un contrat annuel ou pluriannuel.
En tous les cas, lorsque cette démarche est adoptée, la première partie du plan de prévention s’appliquant à toutes les interventions n’est pas suffisante. Il est impératif de l’actualiser et de la compléter à chaque intervention. À titre d’exemple, des entreprises ont pu être condamnées pour absence de plan de prévention car elles avaient établi un plan de prévention annuel trop général ou sans le faire évoluer pour tenir compte de l’intervention à réaliser (Cass. Crim., 2 mars 2010, pourvoi n° 09-84314 et Cass. Crim., 8 novembre 2011, pourvoi n°11-81422).
Mesures préalables spécifiques aux entreprises extérieures
Mesures concernant les travailleurs isolés (art. R. 4512-13 et R. 4512-14 du Code du travail)
Lorsque l'opération est réalisée de nuit ou dans un lieu isolé ou à un moment où l'activité de l’entreprise utilisatrice est interrompue, le chef de l’entreprise extérieure intéressé prend les mesures nécessaires pour qu'aucun salarié ne travaille isolément en un point où il ne pourrait être secouru à bref délai en cas d'accident (dans les établissements agricoles cette obligation ne s'applique qu'aux travaux réalisés dans les locaux de l'exploitation, de l'entreprise ou de l'établissement ou à proximité de ceux-ci).
Il est préconisé, tel que le rappelle la recommandation R474 de la Cnamts (adoptée par le Comité Technique National des industries de la métallurgie le 20 mai 2014 et par le Comité technique national des industries de la chimie, du caoutchouc et de la plasturgie le 13 mai 2014), à l’entreprise utilisatrice et à l’entreprise extérieure de mener une réflexion pour réduire les situations de travail isolé afin de les éviter dans la mesure du possible.
Information préalable des travailleurs (art. R. 4512-15 et R. 4512-16 du Code du travail)
Avant le début des travaux et sur le lieu même de leur exécution, le chef de l’entreprise extérieure :
- fait connaître à l'ensemble des travailleurs qu'il affecte à ces travaux les dangers spécifiques auxquels ils sont exposés et les mesures de prévention mises en œuvre,
- précise notamment les zones dangereuses ainsi que les moyens adoptés pour les matérialiser,
- explique l'emploi des dispositifs collectifs et individuels de protection,
- montre à ces travailleurs les voies à emprunter pour accéder au lieu d'intervention et le quitter, pour accéder aux locaux et installations mis à leur disposition ainsi que, s'il y a lieu, les issues de secours.
Cette démarche d’information doit être renouvelée lorsque de nouveaux travailleurs interviennent en cours de réalisation de l’opération et le contenu des informations transmises doit figurer dans le plan de prévention (circulaire DRT n° 93-14 du 18 mars 1993).
En savoir plus
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Brochure 10/2009 | ED 941
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Fiche 05/2018 | ED 110
Qui interroger, qui avertir en prévention des risques professionnels
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Article de revue 06/2013 | DO 1
Améliorer les conditions d'intervention d'entreprises extérieures
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Article de revue 09/2014 | NT 16
Recours à la sous-traitance : l'expérience de l'IRSN et de l'INRS
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Article de revue 01/2012 | ND 2366
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Vidéo Durée : 39min