Recommandations
Lorsque l’emploi du nickel ou de ses composés est techniquement indispensable, l’exposition des travailleurs doit être réduite au niveau le plus bas possible. Des mesures très strictes de prévention et de protection adaptées au risque s’imposent lors du stockage et de la manipulation de ces substances ou des préparations les contenant.
Au point de vue technique
Information et formation des travailleurs
- Instruire le personnel des risques présentés par la substance, des précautions à observer, des mesures d’hygiène à mettre en place ainsi que des mesures d’urgence à prendre en cas d’accident.
- Former les opérateurs à la manipulation des moyens d’extinction (extincteurs, robinet d’incendie armé…).
- Former les opérateurs au risque lié aux atmosphères explosives (risque ATEX)[31].
- Observer une hygiène corporelle et vestimentaire très stricte : Lavage soigneux des mains (savon et eau) après manipulation et changement de vêtements de travail. Ces vêtements de travail sont fournis gratuitement, nettoyés et remplacés si besoin par l’entreprise. Ceux-ci sont rangés séparément des vêtements de ville. En aucun cas les salariés ne doivent quitter l’établissement avec leurs vêtements et leurs chaussures de travail.
- Ne pas fumer, vapoter, boire ou manger sur les lieux de travail.
Manipulation
- N’entreposer dans les ateliers que des quantités réduites de substance et ne dépassant pas celles nécessaires au travail d’une journée.
- Éviter tout contact de produit avec la peau et les yeux. Éviter l’inhalation de vapeurs, poussières, aérosols. Effectuer en système clos toute opération industrielle qui s’y prête. Dans tous les cas, prévoir une aspiration des poussières et vapeurs à leur source d’émission, ainsi qu’une ventilation des lieux de travail conformément à la réglementation en vigueur[78].
- Réduire le nombre de personnes exposées au nickel et à ses composés.
- Éviter tout rejet atmosphérique de nickel et de ses composés.
- Evaluer régulièrement l’exposition des salariés au nickel et à ses composés présents dans l’air (§ Méthodes de détection et de détermination dans l’air).
- Les équipements et installations conducteurs d’électricité utilisant ou étant à proximité de nickel en poudre ou de tétracarbonyle de nickel doivent posséder des liaisons équipotentielles et être mis à la terre, afin d’évacuer toute accumulation de charges électrostatiques pouvant générer une source d’inflammation sous forme d’étincelles [79].
- Les opérations génératrices de sources d’inflammation (travaux par point chaud type soudage, découpage, meulage…) réalisées à proximité ou sur les équipements utilisant ou contenant du nickel en poudre ou du tétracarbonyle de nickel doivent faire l’objet d’un permis de feu [80].
- Au besoin, les espaces dans lesquels le nickel et ses composés sont stockés et/ou manipulés doivent faire l’objet d’une signalisation [81].
- Ne jamais procéder à des travaux sur ou dans des cuves et réservoirs contenant ou ayant contenu du nickel et ses composés sans prendre les précautions d’usage[82].
- Supprimer toute source d’exposition par contamination en procédant à un nettoyage régulier des locaux et postes de travail.
Équipements de Protection Individuelle (EPI)
Leur choix dépend des conditions de travail et de l’évaluation des risques professionnels.
En présence de nickel en poudre ou de tétracarbonyle de nickel, les EPI ne doivent pas être source d’électricité statique (chaussures antistatiques, vêtements de protection et de travail dissipateurs de charges) [83, 84]. Une attention particulière sera apportée lors du retrait des équipements afin d’éviter toute contamination involontaire. Ces équipements seront éliminés en tant que déchets dangereux [85 à 88].
- Appareils de protection respiratoire : Si un appareil filtrant peut être utilisé, il doit être muni d’un filtre anti-aérosols de type P3 lors de la manipulation de poudre de nickel et de ses composés solides ; pour des opérations exposant au trétracarbonyle de nickel, un appareil de protection respiratoire isolant est recommandé [89].
- Gants : par exemple en caoutchouc nitrile ou polychloroprène généralement recommandés pour les substances sous forme solide [90, 91, 92]. Le point 8 des FDS correspondantes peut renseigner quant à la nature des matériaux pouvant être utilisés pour la manipulation de ces substances (notamment pour le tétracarbonyle de nickel).
- Vêtements de protection : Quand leur utilisation est nécessaire (en complément du vêtement de travail), leur choix dépend de l’état physique de la substance. Seul le fabricant peut confirmer la protection effective d’un vêtement contre les dangers présentés par la substance. Dans le cas de vêtements réutilisables, il convient de se conformer strictement à la notice du fabricant [93].
- Lunettes de sécurité : La rubrique 8 « Contrôles de l’exposition / protection individuelle » de la FDS peut renseigner quant à la nature des protections oculaires pouvant être utilisées lors de la manipulation du nickel et de ses composés [94].
Stockage
- Stocker le nickel et ses composés dans des locaux frais et sous ventilation mécanique permanente. Tenir à l’écart de la chaleur, des surfaces chaudes, de toute source d’inflammation (étincelles, flammes nues, rayons solaires…). Le tétracarbonyle de nickel doit être stocké dans une enceinte ou dans un local à température régulée afin d’éviter d’atteindre sa température d’auto-inflammation (35 à 60 °C selon les sources).
- Prendre toutes les dispositions pour s’assurer de la compatibilité des matériaux des récipients de stockage avec le nickel et ses composés (en contactant par exemple le fournisseur de la substance ou celui du matériau envisagé).
- Fermer soigneusement les récipients et les étiqueter conformément à la réglementation. Reproduire l’étiquetage en cas de fractionnement.
- Le sol des locaux sera imperméable et formera une cuvette de rétention afin qu’en cas de déversement, la substance ne puisse se répandre au dehors.
- En présence de nickel en poudre ou de tétracarbonyle de nickel, mettre le matériel électrique et non-électrique, y compris l’éclairage et la ventilation, en conformité avec la réglementation concernant les atmosphères explosives.
- Mettre à disposition dans ou à proximité immédiate du local/zone de stockage des moyens d’extinction adaptés à l’ensemble des produits stockés.
- Séparer le dinitrate de nickel des produits combustibles ou inflammables. Si possible, le stocker à l’écart des autres produits chimiques dangereux.
- Séparer le nickel en poudre et le tétracarbonyle de nickel des produits comburants. Si possible, les stocker à l’écart des autres produits chimiques dangereux.
Déchets
- Le stockage des déchets doit suivre les mêmes règles que le stockage des substances à leur arrivée (§ stockage).
- Ne pas rejeter à l’égout ou dans le milieu naturel les eaux polluées par le nickel et ses composés.
- Conserver les déchets et les produits souillés dans des récipients spécialement prévus à cet effet, clos et étanches. Les éliminer dans les conditions autorisées par la réglementation en vigueur.
En cas d’urgence
- En cas de déversement accidentel de liquide (cas des solutions aqueuses de composés du nickel solubles dans l'eau), récupérer le produit en l’épongeant avec un matériau absorbant inerte. Concernant le tétracarbonyle de nickel, il faudra préalablement se munir d'un appareil de protection respiratoire isolant. Laver à grande eau la surface ayant été souillée [95].
- Si le déversement est important, aérer la zone et évacuer le personnel en ne faisant intervenir que des opérateurs entrainés et munis d’un équipement de protection approprié. Supprimer toute source d’inflammation potentielle.
- En cas de déversement accidentel de poudre ou de poussières, le balayage et l’utilisation de la soufflette sont à proscrire. Récupérer le produit en l’aspirant avec un aspirateur industriel.
- Si les poussières sont combustibles (cas des formes pyrophoriques du nickel en poudre, cf. propriétés chimiques), n’utiliser qu’un aspirateur adapté à l’aspiration de poussières combustibles.
- Des appareils de protection respiratoire isolants autonomes sont à prévoir à proximité et à l’extérieur des locaux pour les interventions d’urgence.
- Prévoir l’installation de fontaines oculaires (toujours) et de douches de sécurité.
- Si ces mesures ne peuvent pas être réalisées sans risque de sur-accident ou si elles ne sont pas suffisantes, contacter les équipes de secours interne ou externe au site.
Au point de vue médical
- Eviter d'affecter à des postes comportant un risque d'exposition les sujets atteints d'allergie connue au nickel ou à l'un de ses dérivés, et les sujets atteints d'affections respiratoires, ORL ou rénales.
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Lors des visites initiale et périodiques:
- Examen clinique : lors des examens périodiques, rechercher particulièrement des signes d’allergie (cutanée et/ou respiratoire), d’atteintes respiratoire, sinusienne et rénale.
- Examens complémentaires : la fréquence des examens médicaux périodiques et la nécessité ou non d’effectuer des examens complémentaires (épreuves fonctionnelles respiratoires ou spirométrie, bilan rénal, biométrologie, bilan allergologique, imagerie) seront déterminées par le médecin du travail en fonction des données de l’examen clinique et de l’appréciation de l’importance de l’exposition.
- Les recommandations de bonnes pratiques de 2015 sur la surveillance médico-professionnelle des travailleurs exposés ou ayant été exposés à des agents cancérogènes pulmonaires, préconisaient la mise en place d’une expérimentation (actuellement en cours) pour les sujets jugés à haut risque de cancer broncho pulmonaire avec un programme de dépistage du cancer broncho pulmonaire par scanner thoracique basse dose. Pour l’exposition aux composés du nickel, il s’agit des sujets âgés de 55 à 74 ans ayant été exposés au moins 10 ans et tabagiques (≥ 30 paquets-années) actifs ou sevrés depuis moins de 15 ans. En dehors de cette expérimentation, le dépistage du cancer broncho pulmonaire par scanner thoracique basse dose n’est pas recommandé chez les travailleurs étant exposés professionnellement à des cancérogènes pulmonaires [77].
- Fertilité / Femmes enceintes et/ou allaitantes :
- L’exposition des femmes enceintes ou allaitantes au tétracarbonyle de nickel, au dihydroxyde de nickel, au sulfate de nickel, au carbonate de nickel, au dichlorure de nickel et au dinitrate de nickel (classés H360D) est réglementairement interdite. On exposera le moins possible aux autres composés du nickel les femmes enceintes ou désireuses de débuter une grossesse en raison de signaux d’alerte pour le développement. Si malgré tout, une exposition durant la grossesse se produisait, informer la personne qui prend en charge le suivi de cette grossesse, en lui fournissant toutes les données concernant les conditions d’exposition ainsi que les données toxicologiques.
- Informer les salariées exposées des dangers de ces substances pour la grossesse et de l’importance du respect des mesures de prévention.
- Rappeler aux femmes en âge de procréer l’intérêt de déclarer le plus tôt possible leur grossesse à l’employeur, et d’avertir le médecin du travail. Il est conseillé de ne pas commencer une grossesse dans les trois mois suivant une exposition accidentelle, maternelle ou paternelle aux composés du nickel (disulfure de trinickel, dihydroxyde de nickel, sulfate de nickel, carbonate de nickel, dichlorure de nickel, dinitrate de nickel) pour lesquels il existe des signaux d'alerte en termes de génotoxicité. Des difficultés de conception seront systématiquement recherchées à l’interrogatoire. Si de telles difficultés existent, le rôle de l’exposition professionnelle doit être évalué. Si nécessaire, une orientation vers une consultation spécialisée sera proposée en fournissant toutes les données disponibles sur l’exposition et les produits.
- Surveillance biologique de l'exposition [43]
Le dosage urinaire de nickel peut être proposé pour la surveillance biologique de l'exposition professionnelle au nickel et ses composés inorganiques. Des valeurs biologiques d’interprétation pour le milieu professionnel sont proposées par plusieurs organismes, notamment l’ACGIH et la Commission allemande DFG (valeurs BEI et EKA différentes pour les composés solubles et peu solubles), ainsi que le FIOH.
Le RAC (Echa) ne propose ni une VLB ni une BGV au niveau européen. En raison de la grande variabilité des concentrations urinaires de nickel dans les études européennes en population générale, le RAC recommande d’établir des BGV sur la base de données de biosurveillance au niveau local ou national. Ainsi, le 95ème percentile des concentrations urinaires de nickel observé dans la population générale adulte en France de 4,5 µg/L pourrait être retenu comme valeur biologique d’interprétation (VBI) issue de la population générale.
Conduites à tenir en cas d’urgence
- En cas de contact cutané, retirer les vêtements souillés (avec des gants adaptés) et laver la peau immédiatement et abondamment à grande eau pendant au moins 15 minutes. Si une irritation apparaît ou si la contamination est étendue ou prolongée, consulter un médecin.
- En cas de projection oculaire, appeler immédiatement un SAMU. Rincer immédiatement et abondamment les yeux à l’eau courante pendant au moins 15 minutes, paupières bien écartées. En cas de port de lentilles de contact, les retirer avant le rinçage. Après le rinçage, consulter un ophtalmologiste, et le cas échéant signaler le port de lentilles.
- En cas d'inhalation, appeler immédiatement un SAMU, faire transférer la victime par ambulance médicalisée en milieu hospitalier dans les plus brefs délais. Transporter la victime en dehors de la zone polluée en prenant les précautions nécessaires pour les sauveteurs. Si la victime est inconsciente, la placer en position latérale de sécurité et mettre en œuvre, s’il y a lieu, des manœuvres de réanimation. Si la victime est consciente, la maintenir au maximum au repos. Si nécessaire, retirer les vêtements souillés (avec des gants adaptés) et commencer une décontamination cutanée et oculaire (laver immédiatement et abondamment à grande eau pendant au moins 15 minutes).
- En cas d’inhalation de tétracarbonyle de nickel, prévenir également du risque de survenue d’effets retardés notamment d'œdème pulmonaire lésionnel dans les 48 heures suivant l'exposition, et de l’intérêt de consulter en cas d’apparition de signes respiratoires.
- En cas d'ingestion, appeler immédiatement un SAMU, faire transférer la victime en milieu hospitalier dans les plus brefs délais. Si la victime est inconsciente, la placer en position latérale de sécurité et mettre en œuvre, s’il y a lieu, des manœuvres de réanimation. Si la victime est consciente, faire rincer la bouche avec de l’eau, ne pas faire boire, ne pas tenter de provoquer des vomissements.