Pathologie - Toxicologie
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Toxicocinétique - Métabolisme [6, 21, 22]
L’éthanol est rapidement absorbé par voie orale et respiratoire et peu par contact cutané. Il est distribué dans tous les tissus et fluides de l’organisme, notamment le cerveau et le foie, et est principalement éliminé par une métabolisation oxydative dans le foie produisant transitoirement de l’aldéhyde puis de l’acide acétique.
Chez l'animal
La toxicocinétique et le métabolisme ont été bien étudiés chez l’homme. L’éthanol est facilement absorbé par ingestion et par inhalation ; on considère en général que l’absorption percutanée est très faible (environ 1 %). Après une ingestion unique, l’alcoolémie est maximale après 1 heure si l’alcool a été ingéré sans nourriture, après 2 heures autrement ; la vitesse d’absorption varie aussi en fonction des individus, de la vitesse d’ingestion et de la concentration de la solution ingérée : elle est maximale pour les concentrations comprises entre 10 et 30 %. Chez des volontaires inhalant des concentrations de 5 800 à 10 000 ppm, le taux de rétention pulmonaire a été trouvé égal à 62 %, indépendamment de la concentration et de la vitesse de ventilation. Chez des volontaires exposés à 25, 100 et 1 000 ppm, l’absorption est de 70 à 80 %.
L’éthanol absorbé diffuse rapidement et presque uniformément dans tout l’organisme en raison de sa grande solubilité dans l’eau. La distribution est très rapide dans les organes fortement vascularisés comme le cerveau, les poumons, le foie ; et la concentration est maximale dans le liquide céphalo-rachidien et l’urine où elle atteint 1,3 fois la concentration plasmatique, elle-même légèrement supérieure (1,1 fois) à la concentration moyenne dans les organes. L’éthanol traverse librement le placenta et des concentrations similaires sont retrouvées dans le sang maternel et fœtal. Signalons que chez le rat et le cobaye, l’éthanol s’accumule dans le liquide amniotique qui peut servir de réservoir.
La métabolisation de l’éthanol comporte essentiellement une oxydation complète en dioxyde de carbone et eau qui se déroule en 3 étapes. La première qui mène à l’aldéhyde acétique se fait en majeure partie (80 - 90 %) dans le foie sous l’action de l’alcool-déshydrogénase. Les systèmes du cytochrome P450 (inductible) et de la catalase-peroxydase interviennent également à ce stade. L’efficacité de ce dernier est limitée par la lenteur de formation du peroxyde d’hydrogène. La deuxième étape, menant à l’acide acétique, est sous la dépendance de l’aldéhyde-déshydrogénase présente dans le foie (90 %) et dans le rein (10 %). L’activité aldéhyde-déshydrogénase du foie étant supérieure à son activité alcool-déshydrogénase, il n’y a généralement pas, dans les conditions normales, d’accumulation d’aldéhyde acétique. Cependant, en raison du polymorphisme génétique de l’aldéhyde-déshydrogénase, certains groupes ethniques peuvent dégrader plus lentement l’aldéhyde acétique. Une accumulation peut également se produire en présence d’un inhibiteur spécifique de l’aldéhyde-déshydrogénase (disulfirame par exemple). L’acide acétique formé est libéré dans le sang et la troisième étape a lieu principalement dans les tissus périphériques où il est oxydé en dioxyde de carbone et eau.
Au total, la vitesse de métabolisation varie largement selon les individus ; une valeur moyenne déterminée par des essais sur volontaires se situe vers 100 mg/kg par heure. Des individus exposés régulièrement peuvent avoir une vitesse de métabolisation plus importante par induction enzymatique. La clairance plasmatique serait voisine de 220 mg/L par heure. Pour un sujet inhalant des vapeurs d’éthanol tout en accomplissant un travail de force (vitesse de ventilation = 30 L/min), l’équilibre vitesse d’absorption = vitesse de métabolisation assurant la stabilité de l’alcoolémie serait atteint pour une concentration de 3 500 ppm ; après 6 heures d’exposition à 8 500 ppm, l’alcoolémie maximale retrouvée chez de tels sujets est de 470 mg/L.
En dehors de ce processus de détoxication oxydante, une faible partie de l’éthanol absorbé (2 à 5 %) est éliminée sous forme inchangée dans l’air expiré et dans l’urine. Il peut également être excrété dans le lait maternel à une concentration comparable à celle du sang maternel.
Surveillance Biologique de l'exposition
Le dosage d'éthanol sanguin en début et à la fin de l'exposition a été proposé mais il est d'une utilité limitée pour apprécier l'intensité de l'exposition en milieu professionnel. Les résultats ne sont interprétables que si l'on connaît précisément l'absorption d'éthanol d'origine alimentaire du sujet.
Le dosage d'éthanol dans les urines de fin de poste a été proposé mais la corrélation avec l'intensité de l'exposition professionnelle n'a pas été démontrée.
Pour ces deux paramètres, il n’existe pas de valeur biologique d’interprétation pour la population professionnellement exposée.
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Mode d'actions [21, 22]
Les effets neuropsychiques aigus et subaigus de l’éthanol sont dus à l’action directe mais non spécifique de l’alcool sur le parenchyme cérébral : fixé dans les zones corticales, il inhibe le fonctionnement des transmissions synaptiques et déprime ainsi le système nerveux central avec une action principalement analgésique et anesthésique.
Le mécanisme des effets sur le métabolisme des lipides est plus complexe. L’accumulation des graisses dans le foie semble en effet résulter :
- d’une augmentation de la synthèse des triglycérides dans le foie lui-même ;
- d’une augmentation de l’incorporation de glycérol dans la phosphatidylcholine avec déficit relatif de choline ;
- d’une libération de catécholamines qui accélèrent la mobilisation des dépôts graisseux ;
- d’une diminution de la vitesse d’oxydation des acides gras.
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Toxicité expérimentale
Toxicité aiguë [6, 21, 22]
La toxicité aiguë de l’éthanol est faible par inhalation et par ingestion, et négligeable par contact cutané. L’éthanol est irritant pour les yeux mais n’a pas d’effet irritant ou sensibilisant sur la peau.
Pour les diverses espèces étudiées (souris, rats, cobayes, lapins, chiens), les DL50 par voie orale sont comprises entre 5 et 20 g/kg, et les CL50 par inhalation sont voisines de 20 000 à 30 000 ppm pour des expositions de 4 à 6heures. Par voie percutanée, aucun effet toxicologique n’est observé chez le lapin à 20 g/kg vraisemblablement en raison de la faible absorption percutanée.
Quelles que soient la voie d’administration et l’espèce considérées, les symptômes observés sont très semblables à ceux que l’on connaît chez l’homme. Ce sont essentiellement ceux d’une excitation puis d’une dépression du système nerveux central : ataxie, prostration, somnolence, paralysie et dyspnée. La mort survient par défaillance respiratoire ou circulatoire après baisse progressive de la tension artérielle. Dans le cas de l’inhalation, on note en plus une irritation des muqueuses respiratoires.
L’examen anatomo-pathologique révèle des lésions hépatiques : œdème des cellules périphériques des lobules, accumulation de lipides et notamment de triglycérides.
Localement, l’éthanol n’a pas d’effet irritant appréciable sur la peau du lapin, sauf si l’on prolonge le contact 24 heures sous pansement occlusif. Une faible irritation passagère est alors observée.
Sur l’œil de lapin, le produit utilisé pur provoque une irritation oculaire modérée qui se manifeste par une légère opacification de la cornée et une rougeur de la conjonctive modérée à sévère. Ces effets sont réversibles en moins de 14 jours.
Aucune réaction n’a été observée dans un essai de maximisation sur cobaye à une concentration de 75 % et dans des essais de gonflement de l’oreille de souris à 95 %, et l’éthanol ne présente pas de propriété sensibilisante pour la peau.
Toxicité subchronique, chronique [6, 21, 22]
L’éthanol possède une faible toxicité par exposition répétée par voie orale et respiratoire. Les effets se manifestent sur le foie et le système hématopoïétique à des doses élevées. Aucun effet systémique n’est observé par voie cutanée.
Chez le rat, l’administration pendant 12 semaines d’éthanol dans l’eau de boisson à la concentration de 15 % (environ 10 g/kg) provoque un ralentissement de la croissance pondérale et une stéatose hépatique. Cette même stéatose peut se retrouver par administration pendant 14 semaines d’un régime dans lequel l’éthanol représente 33 % de l’apport calorique (environ 12 g/kg). Une diminution du taux d’érythrocytes, de l’hématocrite, de la concentration en hémoglobine et du taux de lymphocytes est également observée à une dose de 8 g/kg/j pendant 10 mois. Chez le singe, recevant pendant 3 mois un régime riche en éthanol (40 % de l’apport calorique), la stéatose hépatique se double d’une stéatose du myocarde ; l’accumulation graisseuse porte à la fois sur les triglycérides, les phospholipides et le cholestérol. Pour des expositions plus longues, les effets hépatiques évoluent vers la cirrhose. En ce qui concerne les effets neurologiques du produit, on note chez les animaux le développement d’une certaine tolérance : pour un taux d’alcoolémie donné, la coordination neuromusculaire est meilleure chez les animaux ingérant régulièrement de l’éthanol que chez les animaux le consommant pour la première fois. Il y a tolérance croisée avec d’autres alcools (1- ou 2-propanol, 1- ou 2-butanol).
Chez les rats, cobayes, lapins, chiens et singes exposés par inhalation en continu à 46 ppm d’éthanol pendant 90 jours, comme chez les cobayes exposés 4 h/j, 6 j/sem, pendant 10 semaines à 3 000 ppm, on n’observe aucune atteinte particulière clinique, biologique ou histologique. Chez le rat et la souris, une inflammation et une nécrose hépatiques interviennent après une exposition comprise entre 6 384 et 10 108 ppm pendant 9 jours. Dans des expérimentations plus anciennes réalisées à forte concentration, on a également signalé des atteintes hépatiques sévères (stéatoses, cirrhose, infiltrations péri-vasculaires hémorragiques). Les effets sur le comportement disparaissent chez le rat après 8 jours d’exposition, 4 h/j à 24 000 ppm.
L’application quotidienne sur la peau du rat de 10 gouttes d’une solution d’éthanol à 50 % dans l’eau, pendant 187 jours, n’entraîne qu’une irritation temporaire.
Effets génotoxiques [6, 21, 22]
Les données suggèrent que l’éthanol provoque des lésions de l’ADN dans les cellules somatiques et germinales.
Sans activité sur Salmonella typhimurium, l’éthanol produit, sans activation métabolique, des mutations ponctuelles sur Escherichia coli, sur Saccharomyces cerivisiae et sur Aspergillus nidulans.
In vitro, il entraîne une augmentation de la fréquence des échanges de chromatides sœurs dans des cultures de cellules ovariennes de hamster ou de lymphocytes humains.
In vivo, une augmentation des échanges de chromatides sœurs est également retrouvée chez les rats et souris exposés par voie orale à des doses massives d’éthanol (> 7 g/kg/j) pendant plusieurs semaines. Il détermine également des mutations létales dominantes chez le rat et la souris mâle par voie orale dès 1240 mg/kg/j pendant 3 jours, et la formation de micronoyaux dans les érythrocytes de la moelle osseuse chez la souris à partir de 620 mg/kg par injection intrapéritonéale. Les essais d’aberrations chromosomiques sont négatifs.
Effets cancérogènes [23]
Selon l’évaluation du CIRC en 2007, il existe des preuves suffisantes de la cancérogénicité de l’éthanol chez l’animal. Il n'y a pas de donnée concernant les risques cancérogènes liés à l'inhalation répétée d'éthanol.
De nombreuses études ont été menées en utilisant des doses massives d’éthanol dans l’eau de boisson. Ces études souvent anciennes et de qualité médiocre montrent des résultats divergents. Plus récemment, chez le rat, aucun effet cancérogène n’a été identifié à 676 et 2 028 mg/kg/j alors que l’éthanol a provoqué l’augmentation de l’incidence des tumeurs mammaires, des carcinomes de la cavité orale, carcinomes du pré-estomac chez le mâle et la femelle, et d’autres sites chez le mâle à 6 760 mg/kg/j. Enfin, une augmentation dose-dépendante de l’incidence des tumeurs hépatiques a été observée chez la souris.
Aucune étude adéquate n’a été réalisée par inhalation.
Effets sur la reproduction [6, 21, 22]
À forte dose, l’éthanol affecte les fonctions reproductrices mâles et femelles et induit une diminution de la viabilité, des malformations et des retards de croissance dans la descendance. Des effets comportementaux sont observés chez la descendance à plus faible dose.
De très nombreuses expérimentations ont été consacrées à l’étude des effets de l’éthanol sur la reproduction. Elles ont porté sur un grand nombre d’espèces (souris, rats, hamsters, cobayes, lapins, chats, chiens, porcs et singes) et ont utilisé différentes voies d’administration (orale, respiratoire, intraveineuse, intrapéritonéale, intratesticulaire et intra-utérine).
Il ressort de façon concordante de toutes ces études que l’éthanol peut exercer des effets sur la fertilité des mâles (action sur la spermatogenèse) et des femelles (perturbation du cycle ovarien, mortalité post-implantation), sur le développement embryonnaire et fœtal et sur les nouveau-nés : défauts de viabilité, retards de croissance, anomalies de développement, troubles du comportement (activité locomotrice, apprentissage...).
Ces effets sont généralement mis en évidence à fortes doses ; ainsi ces résultats s’observent :
- par voie orale, par administration d’éthanol à des doses quotidiennes de 4 g/kg ou plus ;
- par inhalation, par exposition quotidienne de 7 heures à 20 000 ppm.
Toutefois, une étude plus récente a montré une altération de la mémoire et de l’apprentissage chez des rats juvéniles exposés in utero et par le lait maternel de femelles exposées à 1000 mg/kg/j.
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Toxicité sur l’Homme
L'exposition à de fortes concentrations d'éthanol provoque des effets dépresseurs du système nerveux central, associés à une forte irritation des yeux et des voies aériennes supérieures qui est rapidement intolérable. Les projections dans l'œil se traduisent par une conjonctivite réversible. En cas d'exposition répétée, il est possible de noter des irritations des yeux et des voies aériennes associées à des troubles neurologiques légers. Il n'est pas démontré que l'exposition chronique par inhalation puisse provoquer les mêmes troubles organiques que l'ingestion de boissons alcoolisées. Le CIRC a classé en 2007 « l’éthanol dans les boissons alcoolisées » dans le groupe 1 des agents cancérogènes pour l’homme. D’importantes anomalies sont observées dans le domaine de la reproduction chez des nouveau-nés de femmes ayant absorbé de l’éthanol au cours de leur grossesse par ingestion. On ne dispose d’aucune donnée clinique correspondant à des inhalations de vapeurs. Contrairement à l’ingestion, l’inhalation ne conduit pas à l’augmentation significative de la concentration d’éthanol dans le sang. Certains des effets constatés surviennent pour des doses faibles et il convient d’y prêter attention en cas d’exposition importante.
Toxicité aiguë [5, 21, 22, 25, 26]
Les manifestations observées en cas d’intoxication aiguë par ingestion sont bien connues : elles sont essentiellement neuropsychiques (excitation intellectuelle et psychique, puis ivresse caractérisée avec incoordination motrice de type cérébelleux, puis coma plus ou moins profond avec menace du pronostic vital par paralysie des centres respiratoires) et ont pu être reliées de façon assez précise au taux d’alcoolémie. Des altérations neuropsychiques sont observables pour des concentrations d’éthanol dans le sang de 0,2 g/L : diminution du temps de réaction, de la coordination motrice et trouble du jugement. Il est peu probable qu’une telle concentration sanguine puisse provenir de la seule exposition professionnelle par inhalation [30].
Il convient toutefois de signaler que l’alcool industriel présente des dangers particuliers dus notamment aux additifs de dénaturation, et surtout à sa concentration, les produits à plus de 70 % d’éthanol risquant d’entraîner des lésions gastriques sérieuses.
En cas d’inhalation de vapeurs d’éthanol, les risques d’intoxication graves sont faibles car les effets anesthésiques se situent à un niveau de concentration où l’irritation provoquée est intolérable. Les essais réalisés sur volontaires ont permis de préciser les niveaux d’action suivants :
- 1380 ppm : après 30 minutes d’exposition, céphalée suivie d’un léger engourdissement ;
- 3340 ppm pendant 100 minutes : sensation de chaud et froid, irritation nasale, céphalée, engourdissement ;
- 5000 ppm : irritation immédiate des yeux et des voies aériennes supérieures (toux) disparaissant en 5 à 10 minutes ; odeur presque intolérable initialement mais acclimatation rapide ; très vite, céphalée, tension intra-oculaire, sensation de chaleur ; après 1 heure, engourdissement marqué ;
- 9000 ppm : en plus des symptômes ci-dessus, fatigue et somnolence après 30 minutes ;
- 20 000 ppm : larmoiement permanent, toux irrépressible, suffocation ; cette concentration n’est tolérable que pour de très courtes périodes.
Tous ces effets sont transitoires et disparaissent très vite après la fin de l’exposition. En cas d’expositions répétées - ou chez les sujets ingérant régulièrement de l’éthanol - un certain degré de tolérance apparaît : pour une même concentration atmosphérique, les symptômes sont moins sévères et le temps nécessaire pour les faire apparaître est plus long.
La projection de liquide pur dans l’œil provoque immédiatement une douleur cuisante, un larmoiement, des lésions de l’épithélium cornéen et une hyperémie de la conjonctive ; la sensation de corps étranger peut durer 1 jour ou 2 mais, en général, la cicatrisation est spontanée, rapide et complète [24].
Toxicité chronique [5, 21, 25, 26]
Les effets chroniques de l’éthylisme par ingestion avec ses retentissements neuropsychiques (polynévrite, atrophie cérébelleuse, troubles de la mémoire), digestifs (stéatose et cirrhose hépatiques, gastrite chronique, pancréatite), cardio-vasculaires (myocardiopathie, hypertension artérielle) et hématologiques sont rappelés ici pour mémoire. En milieu industriel, cet éthylisme chronique doit retenir l’attention, d’une part, en raison des risques d’accidents liés aux troubles de vigilance et, d’autre part, en raison d’interactions possibles avec les effets toxiques d’autres produits chimiques (notamment synergie avec les effets hépatotoxiques des solvants chlorés, interaction avec les amides, oximes, thiurames et carbonates inhibiteurs d’aldéhyde-déshydrogénase) [27].
Dans le cas d’inhalations répétées de vapeurs d’éthanol, des irritations des yeux et des voies aériennes supérieures, des céphalées, de la fatigue, une diminution des capacités de concentration et de vigilance ont été rapportées. Mais, en dépit de rares observations anciennes non confirmées, il n’est pas établi que cette inhalation chronique puisse avoir - notamment au niveau du foie et du myocarde - des répercussions semblables à celles d’ingestions excessives répétées. Toutefois, une étude, portant sur 1282 travailleurs de l’industrie du caoutchouc et des pneumatiques et comportant un suivi de 15 ans, a conclu à une association significative, chez les sujets de plus de 50 ans, entre exposition à l’éthanol et mortalité par cardiopathie ischémique [28] ; chez ces sujets, manipulant une vingtaine de solvants, on a également trouvé un effet de l’exposition au disulfure de carbone et au phénol. Il semble actuellement qu’une consommation excessive d’alcool soit un facteur favorisant de l’athérosclérose et de ses conséquences, alors qu’une consommation faible aurait un pouvoir protecteur [29].
Localement la répétition d’un contact cutané peut entraîner un érythème et un œdème particulièrement s’il existe une occlusion gênant l’évaporation du produit.
Effets cancérogènes [23]
De nombreuses études prospectives, rétrospectives ou de corrélation indiquent que l’ingestion prolongée d’éthanol (boissons alcoolisées) accroît la fréquence de certains cancers. Ces études concernent la population générale, les sujets alcooliques et dans certains cas les employés de brasseries (production de boissons alcoolisées). Il n’existe pas de données épidémiologiques évaluant le rôle possible de l’inhalation de vapeurs d’éthanol dans la survenue de cancers.
Dans une évaluation récemment mise à jour, le CIRC a analysé ces données concernant l’association possible entre alcool et 27 types de cancers. Lorsque des effets significatifs sont notés, ils surviennent généralement pour une consommation quotidienne de 50 grammes d’alcool pur. On retrouve cette augmentation de risques pour :
- les tumeurs du tractus digestif supérieur (bouche, pharynx, larynx, œsophage), les effets sont nettement majorés par le tabagisme ;
- les tumeurs hépatiques, souvent en liaison avec des atteintes préalables du foie liées à l’alcool (cirrhose) ;
- les tumeurs du sein qui peuvent être légèrement augmentées à partir de doses de 18 grammes par jour (RR 1,13 sur une méta analyse portant sur 58 000 femmes) ;
- les tumeurs colorectales qui ont un risque relatif de 1,4 selon une méta analyse.
Pour d’autres sites, les résultats sont inconstants (on note même parfois une diminution de risque chez le buveur) : reins, lymphomes non-hodgkiniens, poumons et estomac.
Effets sur la reproduction [25, 31, 32]
L’ingestion d’éthanol affecte la fertilité masculine (atrophie testiculaire, réduction de la libido, diminution de la testostérone). Chez la femme alcoolique, on note une perturbation des cycles menstruels. Par ailleurs une diminution de l’incidence de conception par cycle a été notée pour des consommations d’alcool même faibles (5 verres par semaine).
La consommation d’alcool provoque des anomalies congénitales multiples (retard de croissance, perturbation du système nerveux central, malformations externes) ; la fréquence de ces anomalies dépend de la dose quotidienne d’alcool absorbée. Une augmentation du nombre d’avortements ainsi que des retards intellectuels (baisse du QI) et comportementaux sont également rapportés chez des enfants dont les mères ont consommé des doses de 10 à 20 g d’alcool quotidiennement. L’effet peut être augmenté si l’enfant est exposé au cours de l’allaitement.
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Interférences métaboliques
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Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal