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Alcool allylique

Fiche toxicologique n° 156

Sommaire de la fiche

Édition : Novembre 2016

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme [11-13]

    L'absorption de l'alcool allylique est rapide par voies orale, respiratoire et cutanée. Il est métabolisé au niveau hépatique et éliminé en partie par les urines. 

    Chez l'animal
    Absorption

    Le 2-propène-1-ol peut pénétrer dans l'orga­nisme par les voies digestive, percutanée ou respiratoire. L'absorption est rapide : chez le rat, après une ingestion d'environ 100 mg/kg du produit, le taux sanguin maximal (9 à 15 mg/litre) est atteint en 5 à 15 minutes ; il se maintient à ce niveau pendant 2 heures environ.

    Métabolisme

    Les voies de biotransformation du 2-propène-1-ol ont été bien étudiées chez le rat. La première étape, régie par l'alcool-déshydrogénase, mène à l'acroléine ; la réaction s'effectue surtout dans le foie (et particulièrement dans la région périportale) mais aussi dans les reins et les poumons ; le 2-propène-1-ol est pour l'en­zyme un meilleur substrat que l'éthanol (moins bon toutefois que le 1-butanol). L'acroléine for­mée se conjugue au glutathion et est métaboli­sée, pour une part directement en aldéhyde gly­cidique, pour une autre part en plusieurs étapes en acide 3-hydroxypropylmercapturique qui est excrété dans l'urine. On trouve égale­ment, comme métabolites mineurs, de l'hydroxypropylcystéine et son dérivé N-acétylé. Enfin, une faible partie du 2-propène-1-ol peut être transformée en glycérine.

    Excrétion

    Chez les rats ayant ingéré du 2-propène-1-ol, on retrouve en 48 heures dans les urines 6 % de produit sous forme d'acide 3-hydroxypropylmercapturique.

  • Mode d'actions

    L'action toxique du 2-propène-1-ol semble due, en partie au moins, à son principal métabo­lite : l'acroléine. Celle-ci réagit avec une très grande affinité sur les groupements sulfhydryles, d'abord sur ceux du glutathion, puis sur ceux des macromolécules, amenant ainsi des modifications structurelles et fonctionnelles. Les lésions des organites cellulaires interfèrent ensuite avec la synthèse des protéines et des acides nucléiques. Les nécroses locales obser­vées dans le foie semblent dues principalement aux lésions des mitochondries et des lysosomes.

  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë [11-16]

    Les intoxications aiguës se traduisent par des signes digestifs, neurologiques et des altérations hépatiques et rénales. L'inhalation provoque une irritation des muqueuses oculaire et respiratoire. Le contact cutané est modérément irritant et les projections dans l'œil induisent des effets irritants réversibles.

    La DL50 par voie orale chez le rat, comme chez la souris et le lapin, est comprise entre 64 et 105 mg/kg. Quelle que soit l'espèce, les prin­cipaux signes de l'intoxication sont oculaires (larmoiement), neurologiques (somnolence, ataxie, tremblements, convulsions) et digestifs (diarrhée). L'examen anatomo-pathologique des animaux décédés montre une hyperémie des poumons et de différents organes et des lésions hépatiques (foyers nécrotiques dans la région périportale) et rénales (nécrose de l'épi­thélium des tubes contournés et prolifération du tissu interstitiel). Ces deux types de lésions sont également retrouvés chez des rats après administrations orales répétées de produit (4 jours à 25 mg/kg/jour ou 10 jours à 14 mg/kg/jour).

    La CL50 par inhalation chez le rat est de 1 060 ppm pour une exposition d'une heure, de 165 ppm pour 4 heures et de 76 ppm pour 8 heures; la sensibilité des cobayes, lapins et singes est voisine. En plus des symptômes observés après ingestion, l'inhalation pro­voque une irritation des muqueuses (yeux et voies aériennes supérieures) qui est marquée pour les concentrations supérieures à 40 ppm. Si les expositions sont répétées, une certaine accoutumance se développe ; 150 ppm entraîne toutefois la mort de tous les animaux exposés 7 heures/jour, 5 jours/semaine pendant 2 semaines. Selon certains experimentateurs, des modifications hépatiques et rénales sont encore visibles sur des rats exposés pendant 5 semaines à 7 ppm. Dans ces mêmes condi­tions, la concentration de 2 ppm semble n'en­traîner aucune atteinte clinique, biologique ou histologique.

    La DL50 par voie percutanée chez le lapin est de 45 mg/kg, avec des signes toxiques sem­blables à ceux que l'on observe après ingestion.

    Du fait de son importante toxicité cutanée, l'effet irritant du produit n'a pas pu être correc­tement apprécié chez le lapin. Sur l'œil de celui-ci, la réaction est modérément sévère, avec un œdème de la conjonctive et, au niveau de la cornée, une hyperémie et une opacifica­tion qui disparaissent en 48 heures; l'œil est complètement normal après une semaine.

    Toxicité subchronique, chronique [11-13]

    Les effets de faibles doses répétées sont généralement modérés avec une atteinte de l'état général et des altérations hépatique et rénale ainsi qu'une irritation des voies respiratoire et des muqueuses oculaires.

    Des rats ont reçu pendant 15 semaines dans leur eau de boisson des doses de 2-propène-1-ol correspondant à une ingestion quotidienne de 0,15 à 70 mg/kg de produit. Jusqu'à 12 mg/kg par jour, on ne remarque aucune atteinte particu­lière (clinique, biologique ou histologique). À 29 mg/kg par jour, on observe une augmentation du poids relatif du foie, des reins et/ou de la rate. À 42 mg/kg par jour, les animaux perdent en plus du poids. À 70 mg/kg par jour, apparais­sent des foyers nécrotiques dans le foie.

    Pour un traitement prolongé 8 mois, la dose quoti­dienne de 0,05 mg/kg n'entraîne aucune anoma­lie. À 2,5 mg/kg par jour, on retrouve les lésions caractéristiques du foie et des reins.

    Chez des rats exposés 7 heures/jour, 5 jours/semaine, pendant 12 semaines à des concentrations atmosphériques allant de 20 à 60 ppm on a observé :

    • à 20 ppm, un retard de croissance ;
    • à 40 ppm, une augmentation du poids rela­tif des poumons et une irritation des voies aériennes supérieures qui régresse après les premières expositions ;
    • à 60 ppm, une augmentation du poids rela­tif des reins, une irritation oculaire persistante, une suffocation qui régresse après les pre­mières expositions et une mortalité de 10 % des animaux.

    Pour une exposition prolongée 6 mois (7 heures/jour, 5 jours/semaine), la dose de 2 ppm reste sans effet chez le rat.

    Effets génotoxiques [13]

    Certains métabolites de l'alcool allylique ont des propriétés génotoxiques.

    Le 2-propène-1-ol est mutagène pour plu­sieurs souches de Salmonella typhimurium dans les conditions du test d'Ames ; une acti­vation métabolique n'augmente pas cette mutagénicité. Le produit est, en revanche, inac­tif sur Aspergillus et sur Streptomyces.

    L'acroléine, premier métabolite du 2-propène-1-ol, et l'aldéhyde glycidique, qui dérive de l'acroléine par époxydation, sont des muta­gènes reconnus.

    Effets cancérogènes [13]

    On ne dispose pas de donnée sur d'éventuels effets cancérogènes de l'alcool allylique.

    Il n'existe pas de donnée publiée sur un éventuel potentiel cancérogène du 2-propène-1-ol.

    L'aldéhyde glycidique, quant à lui, est un cancérogène cutané reconnu pour l'animal de laboratoire (développement de papillomes et de carcinomes par application cutanée chez la souris et le rat).

    Effets sur la reproduction [11, 13]

    Les essais réalisés ne permettent pas de se prononcer sur les risques pour la reproduction de l'alcool allylique.

    L'injection intra-amniotique de 2-propène-1-ol chez des rates au 13e jour de gestation, à des doses allant de 100 à 1 000 mg/fœtus, entraîne une augmentation des résorptions fœtales proportionnelle à la dose. L'acroléine est 100 fois plus active dans ce test.

    L'injection de 2-propène-1-ol dans des œufs de poule n'exerce pas d'effet tératogène sur les embryons ; mais, pour des doses embryo­toxiques, on observe une opacification de la cornée.

  • Toxicité sur l’Homme

    L'inhalation de fortes concentrations provoque une irritation des voies respiratoires et des yeux ainsi que des troubles digestifs et neurologiques (parfois convulsifs). Les projections sur la peau se traduisent par des brûlures réversibles de même que les projections dans les yeux. Il n'y a pas de donnée sur les effets chroniques chez l'homme de l'alcool allylique. On ne dispose pas de donnée sur d'éventuels effets cancérogènes ou sur la fonction de reproduction.

    Toxicité aiguë [12-14, 16]

    Les vapeurs de 2-propène-1-ol sont irri­tantes pour les muqueuses oculaires (seuil habituel d'irritation : 5 ppm) et nasales (seuil habituel d'irritation : 10 à 15 ppm). À partir de 25 ppm, l'irritation oculaire est sévère, avec lar­moiement, photophobie, vision trouble et dou­leur rétrobulbaire. En l'absence de traitement immédiat, les symptômes peuvent persister 24 à 48 heures mais la récupération est, en géné­ral, totale (on a signalé toutefois un cas de nécrose cornéenne avec cécité temporaire). À forte concentration, les muqueuses respira­toires profondes sont atteintes (toux, gêne res­piratoire, suffocation) et il existe un risque d'œdème pulmonaire retardé. On a signalé quelques cas de troubles gastro-intestinaux (nausée, vomissement) et des céphalées sévères chez des travailleurs exposés à des vapeurs à la suite d'un déversement accidentel de produit ; la récupération a été totale.

    Le contact du liquide avec la peau provoque une irritation (sensation de brûlure, rougeur, formation de vésicules) dont l'intensité est variable - on peut avoir jusqu'à des brûlures du 2e degré - et qui peut apparaître quelques heures seulement après le contact. On signale aussi localement des douleurs « profondes » dues vraisemblement à des spasmes muscu­laires provoqués par la pénétration du produit. Des symptômes systémiques, signant l'ab­sorption rapide du produit, peuvent être égale­ment observés : irritation oculaire, troubles gastro-intestinaux, hyperémie viscérale notamment hépatique et rénale.

    Les projections de liquide sur l'œil peuvent entraîner un œdème conjonctival avec hyper­émie, suivi parfois de phlyctènes et lésions cornéennes qui disparaissent habituellement en quelques jours.

    L'ingestion accidentelle du produit -qui est exceptionnelle - serait à l'origine de symp­tômes irritatifs avec chute tensionnelle et manifestations convulsives de pronostic sévère.

    Toxicité chronique [12-14]

    Il n'a pas été décrit d'affection liée à l'exposi­tion prolongée à de faibles concentrations de vapeurs de 2-propène-1-ol. En particulier, aucune étude n'a rapporté d'observation, de lésion hépatique liée à une telle exposition. Il semble exclu que le produit ait un effet cumula­tif. En cas d'expositions répétées, on n'a noté ni augmentation de la sensibilité ni accoutu­mance.

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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