Pathologie - Toxicologie
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Toxicocinétique - Métabolisme [1, 22, 23]
Le 4,4’-MDI est absorbé par inhalation et, à faible taux, par voie cutanée. Il se dépose en grande partie localement ; après absorption, le 4,4’-MDI est hydrolysé en 4,4’-méthylènedianiline (4,4’-MDA), acétylée dans le foie et éliminée principalement par voie urinaire sous forme de 4,4’-MDA mono-acétylée.
Chez l'animal
Absorption
Il n’y a pas d’information sur le devenir du 4,4’-MDI chez l’animal après exposition orale [24].
Des rats ont été exposés pendant 6 heures à 3,7 mg/m3 de 4,4’-MDI radiomarqué (par inhalation) : les auteurs ont estimé entre 25 et 32 % la dose absorbée, 168 heures après la fin de l’exposition [25].
Le 4,4’-MDI est faiblement absorbé par voie cutanée. Chez des rats mâles exposés à 15 ou 165 mg/kg de 4,4’-MDI radiomarqué sur la peau pendant 8 heures (sous pansement occlusif), moins de 1 % de la dose déposée est détectée dans les urines, fèces ou tissus, 120 heures après le début de l’exposition [26].
Il n’y a pas d’information sur le devenir du 4,4’-MDI chez l’animal après exposition orale.
Après inhalation, le pMDI se dépose au niveau du nez et des alvéoles pulmonaires où il est absorbé ; le 4,4’-MDI (aérosol, rat, nez seul pendant 15 minutes) se dépose essentiellement dans les poumons et, en concentration moindre, dans les muscles, le foie, les reins et le tractus gastro-intestinal. Il est hydrolysé en 4,4’-méthylènedianiline (4,4’-MDA), qui est acétylée dans le foie. Des adduits à l’hémoglobine ont été mesurés chez le rat après exposition répétée pendant 12 mois à un aérosol de 4,4’-MDI ; la molécule fixée est la 4,4’-MDA. Le taux d’adduits diminue de 40 % après 1 semaine de récupération. Après exposition de rates gestantes (20e jour de gestation, 20 mg/m3 pendant 6 heures), la 4,4’-MDA est retrouvée sous forme conjuguée dans le sang maternel, le placenta, le sang fœtal et le liquide amniotique.
Le 4,4’-MDI est légèrement absorbé par voie cutanée ; 10 à 12 % des molécules de 14C]4,4’-MDI, déposées sur le dos du rat (2,5-3,6-6,9 mg), restent dans l’épiderme ; une partie passe dans le sang et est distribuée de façon uniforme dans les tissus ; la concentration sanguine est 100 fois inférieure à celle de l’épiderme.
Le métabolisme du 4,4’-MDI est peu connu chez l’homme, il serait semblable à celui de l’animal. Des adduits 4,4’-MDA-hémoglobine ont été mesurés dans le sang des ouvriers exposés.
Distribution
Après inhalation, le PMDI se dépose au niveau du nez et des alvéoles pulmonaires où il est absorbé ; le 4,4’-MDI (aérosol, rat, nez seul pendant 15 minutes) se dépose essentiellement dans les poumons et se distribue, en concentration moindre, dans les muscles, le foie, les reins et le tractus gastro-intestinal [27].
Suite à une exposition à 2 mg/m3 de 4,4’-MDI radiomarqué (inhalation, exposition tête seule, pendant 6 heures), les niveaux de radioactivité les plus élevés sont mesurés dans les tractus respiratoire et gastrointestinal, ainsi que dans tous les tissus examinés (8 heures après l’exposition). Selon les auteurs, la présence de radioactivité dans le tractus gastrointestinal pourrait résulter d’une ingestion liée au toilettage des animaux pendant l’exposition et/ou à la clairance mucociliaire [25].
Dans l’étude cutanée citée précédemment, aucune radioactivité n’est détectée dans les tissus 120 heures après le début de l’exposition cutanée [26]. Dans une étude plus ancienne (rats femelle, application de 11-15 mg/kg de 14C 4,4’-MDI sur la peau pendant 24 heures ou de 29-30 mg/kg 14C 4,4’-MDI pendant 48 heures), de faibles quantités de radioactivité sont détectées dans la langue, les poumons, le foie et les reins (≤ 1 % pour ces 2 organes) ; 9 à 12 % des molécules de 14C 4,4’-MDI déposées restent dans l’épiderme [28].
Après exposition de rates gestantes (19e jour de gestation, 20 mg/m3 pendant 6 heures, corps entier), la 4,4’-MDA est retrouvée sous forme conjuguée dans le sang maternel, le placenta, le sang fœtal et le liquide amniotique [27].
Métabolisme
Suite à l’inhalation de 4,4’-MDI, la principale voie métabolique consiste en sa combinaison avec différentes macromolécules de l'organisme (protéines, glycoprotéines, glutathion), ou l’eau, produisant ainsi des adduits dans la circulation sanguine [5].
Le 4,4’-MDI restant, non fixé aux macromolécules, peut subir une hydrolyse acide et former la 4,4'-méthylènedianiline (4,4'-MDA). Au niveau du foie, la 4,4'-MDA peut ensuite être acétylée en N-acétyl-MDA ou réagir avec des molécules de MDI libre et former ainsi des polyurées (MDI-polyurée). Suite à l'ingestion de 4,4’-MDI, cette voie serait la voie métabolique principale [5].
Suite à une exposition par inhalation, 5 métabolites urinaires ont été détectés dont 4 identifiés comme des composés N-acétylés et N-acétylhydroxylés [25, 27]. Il s’agit du:
- N,N′-diacétyl-4,4′-diaminobenzhydrol,
- N,N′-diacétyl-4,4′-diaminophénylméthane,
- N-acétyl-4,4′-diaminophénylméthane,
- N,N′-diacétyl-4,4′-diaminobenzophénone.
Des adduits à l’hémoglobine ont été mesurés chez le rat après exposition répétée pendant 12 mois à un aérosol de 4,4’-MDI (adduits à la 4,4’-MDA). Le taux d’adduits diminue de 40 % après 1 semaine de récupération (sans exposition).
Excrétion
Chez le rat, 4 jours après exposition par inhalation (0,06 ou 0,4 mg/m3 de 4,4’-MDI pendant 15 min), 70 % de la dose absorbée sont éliminés (57 % dans les fèces et 13 % dans l’urine) ; 23 % restent dans la carcasse dont moins de 1 % dans les organes [27].
Suite à l’exposition pendant 6 heures à 2 mg/m3 de 4,4’-MDI radiomarqué, les rats mâles ont excrété la majorité de la radioactivité dans les fèces (80 %) et seulement 5 % dans les urines (≤ 1 % de chaque métabolite), 168 heures après l’exposition [25].
Après exposition cutanée de rats à du 14C 4,4’-MDI, 20 % des molécules radiomarquées absorbées sont éliminées dans les fèces et moins de 1 % dans l’urine en 24 heures [28].
Comme pour les résultats obtenus par inhalation, les quantités importantes de radioactivité retrouvées dans les fèces sont attribuables au toilettage des rats entrainant l’ingestion de la substance [5, 27].
Chez l'Homme
Même si le métabolisme du 4,4’-MDI est peu connu chez l’Homme, il serait semblable à celui de l’animal.
Par voie cutanée, entre 0,01 et 0,02 % de la dose appliquée de 4,4’-MDI (0,8 mg/cm², pendant 8 heures) est absorbée et retrouvée dans les urines [29].
Chez des travailleurs exposés au 4,4’-MDI par inhalation durant la fabrication de polyuréthane, des métabolites et des adduits ont été mesurés dans l'urine. La majorité des isocyanates inhalés semblent être excrétés par cette voie dans les heures suivant l'exposition.
Des adduits à l’hémoglobine et à l’albumine ont été identifiés chez respectivement 27 et 64 % de travailleurs exposés au 4,4’-MDI [30].
Chez des ouvriers exposés au MDI, la demi-vie plasmatique de la 4,4’-MDA est de 21 jours et la demi-vie urinaire de 70-80 heures [5].
Surveillance Biologique de l'exposition
La MDA totale urinaire, diamine dérivée, (après hydrolyse) en fin de poste est un indicateur de l'exposition de la journée de travail. La corrélation avec les concentrations atmosphériques de MDI est inconstante, notamment en raison de l’importance de la pénétration cutanée. Cet indicateur n’est pas spécifique, il résulte également d’une exposition à la MDA.
Des valeurs biologiques d’interprétation (VBI) professionnelles et issues de la population générale sont disponibles pour cet indicateur.
Certains adduits du MDI à l’albumine ou à l’hémoglobine constituent des biomarqueurs spécifiques mais ne sont pas proposés en routine pour la surveillance biologique des travailleurs exposés.
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Mode d'actions
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Toxicité expérimentale
Toxicité aiguë [1, 22]
Le 4,4’-MDI présente une faible toxicité par voies orale et cutanée, et est toxique par inhalation ; il est irritant pour la peau et les voies respiratoires et sensibilisant cutané et respiratoire.
Les DL50/CL50 sont résumées dans le tableau I.
Par voie orale, aux doses testées, le 4,4’-MDI n’induit pas de signes de toxicité immédiate.
Des lapins exposés par voie cutanée (4,4’-MDI, 2500, 3900, 6000, 9400 mg/kg) ne présentent qu’une légère atonie et un œdème à la plus forte dose.
Des cobayes, exposés par inhalation (4,4’-MDI, 0,6 à 350 mg/m3 pendant 3 heures), présentent, aux faibles concentrations, une diminution de la fréquence respiratoire et une augmentation du volume courant alors qu’aux concentrations supérieures à 10,4 mg/m3, la fréquence respiratoire augmente. Chez la souris (10,2 à 58,5 mg/m3), la fréquence respiratoire ne fait que diminuer en fonction de la concentration.
Des rats, exposés au PMDI (aérosol, 384-418-523 mg/m3/4 h), respirent difficilement surtout aux plus fortes concentrations ; l’autopsie révèle hémorragies et œdème du poumon.
Tableau I. DL50/CL50 du 4,4'-MDI et du PMDI
Irritation, sensibilisation [27]
Le 4,4’-MDI (0,5 mL), appliqué sous occlusion sur la peau abrasée du lapin pendant 4 heures, provoque une irritation légère à sévère ; son application sous pansement semi-occlusif pendant 4 heures entraine une irritation sévère, réversible pour 5 des 6 animaux testés après 14 jours de récupération [1]. Le PMDI (liquide), appliqué sur la peau abrasée du lapin pendant 24 heures, provoque un érythème faible, réversible en 7 jours.
Instillé dans l’œil du lapin, le PMDI est irritant, il provoque des larmoiements et une conjonctivite réversible après rinçage ; le 4,4’-MDI n’entraine pas d’irritation oculaire [1].
En revanche, le 4,4’-MDI est un irritant pulmonaire : la RD50 (dose qui réduit de 50 % la fréquence respiratoire) est de 32 mg/m3 chez la souris [32] ; chez le rat, le seuil d’irritation pulmonaire aiguë induite par le PMDI a été déterminé à 0,5 mg/m3 (aérosol) [33].
Le 4,4’-MDI est un sensibilisant cutané ; il induit une immunité humorale et cellulaire responsable de l’hypersensibilité. Des résultats positifs ont été obtenus dans plusieurs tests comme le LLNA (souris) ou le test de maximisation (cochon d’Inde) ; un test de gonflement de l’oreille chez la souris a permis d’établir une dose nécessaire pour sensibiliser 50 % des animaux à 0,73 mg/kg. Le PMDI, en revanche, n’est pas un sensibilisant cutané dans le test de Magnusson et Kligman chez le cobaye [34]. Des réactions croisées ont été montrées avec d’autres isocyanates et, en particulier, le TDI (diisocyanate de toluylène) [35].
Le 4,4’-MDI est aussi un sensibilisant respiratoire pour le cobaye après induction par injection intradermique ou cutanée et déclenchement par inhalation [36]. Le PMDI induit une sensibilisation respiratoire chez le cobaye après injection intradermique ou inhalation (aérosol) [37].
Toxicité subchronique, chronique [1, 2, 22]
L’exposition prolongée par inhalation au 4,4’-MDI ou au PMDI induit des lésions du tractus respiratoire de sévérité croissante avec la concentration.
L’exposition de rats à un aérosol de PMDI (2,2-4,9 et 13,6 mg/m3, 6 h/j, 5 j/sem pendant 2 semaines) induit une détresse respiratoire, dont la sévérité augmente avec la concentration, une augmentation du poids des poumons et une diminution de la prise de poids ; la forte concentration est létale surtout pour les mâles. La NOAEL est de 2,2 mg/m3 [38].
Une exposition prolongée pendant 13 semaines (PMDI aérosol, 4,1-8,4-12,3 mg/m3, 6 h/j, 5 j/sem) induit, à la forte concentration, létalité (25 % des animaux), retard de croissance et diminution de poids corporel chez les mâles, ainsi que détresse respiratoire sévère, dégénérescence des tissus du nez (atrophie de l’épithélium olfactif) et modifications inflammatoires focales des poumons, de sévérité croissante avec la concentration [38].
Une exposition pendant 24 mois (PMDI aérosol, 0,2 -1 - 6 mg/m3, 6 h/j, 5 j/sem) montre que les effets sont limités au tractus respiratoire et apparaissent dès 1 mg/m3 : cavité nasale (dégénérescence de l’épithélium olfactif dans les deux sexes et hyperplasie des cellules basales chez les mâles), poumons (fibrose et pneumonie interstitielle) et ganglions médiastinaux. Des particules jaunâtres s’accumulent en fonction du temps et de la concentration au niveau du conduit alvéolaire ; des macrophages pigmentés sont également trouvés dans l’interstitium alvéolaire et dans les ganglions lymphatiques médiastinaux [39]. Une exposition semblable au 4,4’-MDI (aérosol, 0,2-0,7-2 mg/m3, 17 h/j, 5 j/sem) provoque, chez le rat femelle, des lésions pulmonaires en relation avec la concentration (augmentation de poids des poumons, hyperplasie focale et multifocale alvéolaire et bronchoalvéolaire, fibrose interstitielle, accumulation de macrophages pigmentés et chargés de particules) et une inflammation de la cavité nasale (uniquement à la plus forte concentration) ; ces effets sont reliés à un déficit de la fonction pulmonaire. Contrairement au PMDI, le monomère n’induit pas de lésion nasale. A noter que dans tous les groupes (témoin + exposés), la mortalité est importante : 50 % après 17 mois d’exposition et 81 % après 24 mois. Aucune NOAEC n’a pu être déterminée pour le 4,4’-MDI à partir de ces résultats [2, 27].
Effets génotoxiques [1, 22, 23, 40-42]
Dans les tests pratiqués in vitro, les résultats obtenus avec le 4,4’-MDI correspondent à ceux d’un mutagène douteux à faible, les effets étant probablement en lien avec la formation de MDA. In vivo, un test des comètes donne des résultats négatifs.
In vitro
Les données disponibles in vitro (Cf. Tableau II) sont difficiles à interpréter compte tenu de la rapide dégradation du 4,4’-MDI en MDA en présence de véhicule comme le DMSO, la MDA étant connue pour induire des résultats positifs dans ces tests (mutagène de catégorie 2 dans le CLP) [2, 32].
Tableau II. Effets génotoxiques du 4,4'-MDI et du PMDI in vitro.
In vivo
Chez le rat, aucun adduit à l’ADN n’a été détecté dans les poumons ou d’autres organes comme le foie ou les reins après inhalation de 4,4’-MDI ; au niveau de l’épithélium olfactif, de très faibles quantités d’adduits ont toutefois été mesurées. En revanche, ce type d’adduits a été retrouvé dans le foie de rats, après ingestion de 4,4’-MDA [43].
Concernant le 4,4’-MDI, l’augmentation du nombre de micronoyaux dans la moelle osseuse de rats exposés par inhalation, en lien avec la concentration (7 ou 113 mg/m3, 1 h/sem, 3 sem), est discutable en raison de problèmes méthodologiques comme l’absence de contrôles positifs et de données historiques, ou l’évaluation uniquement après 7 jours [27]. A contrario, un test de micronoyaux réalisé selon les lignes directrices de l’OCDE donne un résultat négatif (rat, 9 ou 118 mg/m3, 1 h/sem, 3 sem), les animaux exposés présentant des difficultés à respirer, un écoulement nasal important et une augmentation du poids des poumons [42].
Dans une étude récente datant de 2017, des rats mâles ont été exposés à un aérosol de 4,4’-MDA (2-5-11 mg/m3, pendant 6 heures, uniquement par le nez) pour évaluer les dommages à l’ADN au niveau de différents organes par un test des comètes. Dans les conditions de réalisation de ce test, les résultats sont négatifs [2].
Effets cancérogènes [1, 2, 40]
Le PMDI est un cancérogène pulmonaire par inhalation pour le rat.
Les rats, exposés par inhalation (0 - 0,2 - 1,0 et 6,0 mg/m3 aérosol de PMDI contenant 44,8 à 50,2 % de 4,4’-MDI, 6 h/j, 5 j/sem, pendant 2 ans) présentent des effets toxiques limités au tractus respiratoire. À l’examen microscopique, on observe une hyperplasie des cellules basales dans l’épithélium olfactif du nez, une accumulation de macrophages contenant du 4,4’-MDI dans les conduits alvéolaires, une fibrose des tissus entourant ces accumulations, une augmentation des particules calcifiées dans le poumon et une hyperplasie bronchiolo-alvéolaire. Des tumeurs pulmonaires (8 adénomes-rats mâle et femelle et 1 adénocarcinome-rat mâle) se développent à la plus forte concentration, probablement par des mécanismes épigénétiques secondaires à l’irritation [39].
Une exposition au 4,4’-MDI (rats femelles, aérosol, 0,2-0,7-2 mg/m3, 17 h/j, 5 j/sem, pendant 2 ans) est à l’origine d’un adénome broncho-alvéolaire seulement à la plus forte concentration testée [2, 27].
Effets sur la reproduction [1, 22, 40]
Le PMDI n’est pas toxique pour les organes reproducteurs du rat. Le PMDI et le 4,4’-MDI sont toxiques pour le développement uniquement à des concentrations toxiques pour les mères ; ils ne sont pas tératogènes aux concentrations testées.
Fertilité
Il n’y a pas d’étude de l’effet du 4,4’-MDI sur la fertilité; toutefois, aucun effet sur les organes reproducteurs de rats mâle et femelle n’ont été rapportés dans les études de toxicité chronique réalisées.
Développement
Des rates gestantes exposées au PMDI (0 - 1 - 4 - 12 mg/m3, 6 h/j, du 6e au 15e jour de gestation) présentent, à la forte concentration, une toxicité maternelle importante (létalité, lésion du tractus respiratoire, baisse de la prise de poids, diminution du poids du foie et augmentation du poids des poumons) ; à cette concentration, il y a une foeto/embryotoxicité caractérisée par une réduction de poids du placenta et du fœtus, une augmentation de l’incidence des variations squelettiques et des retards de croissance [44].
Les rates gestantes exposées au 4,4’-MDI (0 - 1 - 3 - 9 mg/m3, 6 h/j, du 6e au 15e jour de gestation) présentent toutes une diminution de la prise de nourriture transitoire et, à la forte concentration, une augmentation du poids des poumons ; à cette concentration, une légère augmentation du nombre de portées avec des fœtus présentant des sternèbres asymétriques est observée. Une augmentation significative des variations squelettiques ou des retards d'ossification a été observée chez les fœtus à toutes les doses [45].
Dans ces 2 études, aucun effet tératogène n’est rapporté.
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Toxicité sur l’Homme
L'exposition aiguë provoque une atteinte des muqueuses respiratoires de type irritatif avec évolution possible vers un œdème pulmonaire lésionnel d’apparition retardée dans les cas les plus graves. L'irritation de la peau et des yeux peut également être particulièrement importante. L'exposition répétée se traduit par des manifestations allergiques : eczéma, asthme, pneumopathie d'hypersensibilité, conjonctivites. Les études disponibles ne permettent pas de conclure quant à un éventuel effet génotoxique, cancérogène, ou toxique pour la reproduction chez l'Homme du 4,4'-MDI.
Le 4,4’-MDI est moins volatil que le diisocyanate de toluylène (TDI), mais peut néanmoins pénétrer dans les voies respiratoires sous forme de vapeurs quand il est chauffé, ou d’aérosols quand il est pulvérisé.
Toxicité aiguë [1, 5, 22, 46-48]
La projection cutanéomuqueuse provoque des brûlures chimiques d’intensité variable en lien avec la concentration et le temps de contact. Des études ont rapporté des cas de dermatite de contact allergique après une exposition cutanée unique [49].
L’exposition brève et massive au 4,4’-MDI provoque des manifestations toxiques, qui peuvent être collectives, susceptibles de n’apparaître qu’après un délai de quelques heures, et dont la gravité est fonction de la concentration atmosphérique du produit. Il peut s’agir :
- de signes d’irritation des muqueuses oculaires (conjonctivite), des voies aériennes supérieures (rhinite, pharyngite) ; le contact avec la peau peut également provoquer une irritation locale ;
- de signes pulmonaires à type d’irritation bronchique (douleurs thoraciques, toux, dyspnée asthmatiforme) avec évolution possible vers un œdème pulmonaire lésionnel d’apparition retardée dans les cas les plus graves.
Dans une observation, un homme de 54 ans exposé de façon brève à une forte concentration de 4,4’-MDI (non chiffrée) a manifesté des signes immédiats d’intolérance avec mal de gorge, toux, oppression thoracique et céphalées, puis une réaction asthmatiforme à chaque nouvelle exposition à de faibles concentrations de MDI. L’asthme a été confirmé par un test de provocation respiratoire spécifique [50].
Toxicité chronique [1, 5, 22, 46-48, 51-54]
L’exposition répétée à des concentrations plus faibles peut être à l’origine d’une sensibilisation chez un certain nombre de sujets, provoquant ainsi des affections allergiques cutanées et respiratoires apparaissant après un délai de quelques semaines à plusieurs années :
- eczéma de contact peu fréquent sur les zones exposées (mains, poignets...) lors de l’utilisation de colles ou de résines contenant du 4,4’-MDI [55] ; quelques cas d’urticaire sont également rapportés ;
- blépharoconjonctivites, vraisemblablement de mécanisme allergique ;
- rhinite allergique ;
- asthme allergique ou de mécanisme complexe : allergique (réaction soit à IgG, soit à IgE) et pharmacologique (inhibition des récepteurs R-adrénergiques et des cholinestérases bronchiques), caractérisé par la survenue de crises dyspnéiques vespérales, nocturnes ou survenant sur les lieux de travail. La poursuite de l’exposition entraîne l’aggravation de la maladie asthmatique avec des décès rapportés [56] et l’évolution vers une insuffisance respiratoire obstructive sévère. De plus le suivi à moyen terme montre que près de la moitié des victimes restent symptomatiques malgré l’éviction en lien avec une importante hyperréactivité bronchique [57]. Par ailleurs des sensibilisations croisées avec d’autres isocyanates tels que le TDI et le diisocyanate d’hexaméthylène (HDI) ont été mises en évidence ;
- pneumopathie d’hypersensibilité, caractérisée par la survenue d’une dyspnée et d’un syndrome pseudogrippal 6 à 8 heures après l’exposition, avec des opacités micronodulaires ou réticulomicronodulaires sur la radiographie pulmonaire, et une altération des épreuves fonctionnelles respiratoires (diminution de la perméabilité alvéolocapillaire, syndrome restrictif) ; si l’exposition est poursuivie, les lésions pulmonaires évoluent vers une fibrose interstitielle diffuse.
Effets génotoxiques [1]
Certaines études mettent en évidence des effets cytogénétiques sur les cellules de sujets exposés au 4,4’-MDI. Ces résultats sont actuellement trop incomplets ou de méthodologie imprécise pour permettre de conclure.
Effets cancérogènes [1, 40, 58]
Lors de sa dernière évaluation en 1999, le CIRC a conclu que les trois études de cohortes (Etats-Unis, Suède et Royaume Uni) et l’étude cas-témoins examinées ne retrouvaient pas d'association évidente entre l'exposition aux isocyanates (expositions mixtes MDI/TDI dans les cohortes britannique et suédoise, expositions au TDI dans la cohorte américaine) et la survenue de cancers [40]. Un risque accru de décès par cancer du poumon est retrouvé uniquement chez les femmes dans la cohorte britannique, confirmé par la mise à jour des données des cohortes britanniques [59] et suédoise [58]. Cependant, l’absence d’effet similaire chez les hommes, les co-expositions et l’absence de relation dose-effet ne sont pas en faveur d’une association causale entre cancer du poumon et l’exposition au MDI (aucune des études citées ci-dessus ne prend en compte le tabagisme notamment).
Effets sur la reproduction
Aucune donnée n’est disponible chez l’Homme à la date de publication de cette fiche toxicologique (2024).
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Interférences métaboliques
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Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal