Prélèvements de surface
Les prélèvements surfaciques sont nettement moins utilisés que les prélèvements d'atmosphère. Ils concernent essentiellement les agents chimiques. Ils présentent un intérêt pour mettre en évidence des polluants dans des endroits où ils ne devraient pas se trouver, vérifier l’efficacité de mesures de dépollution ou pour mettre en évidence le passage de polluants à travers des gants.
Intérêt des prélèvements de surface
En hygiène industrielle, l’évaluation de l’exposition aux composés chimiques est souvent restreinte à la seule mesure de la fraction inhalable de l’environnement de travail, sous forme de gaz ou d’aérosols.
Pourtant, l’inhalation n’est pas le seul mode de pénétration des polluants dans l’organisme. En effet, l’exposition cutanée représente une voie de pénétration non négligeable, soit de façon directe par dépôt des polluants sur la peau laissée sans protection ou insuffisamment protégée, soit de manière indirecte par contact de la peau avec des surfaces elles-mêmes contaminées par ces polluants. Cette contamination surfacique résultant de dépôt d’aérosol et de molécules peu volatiles, voire d’éclaboussure peut donc induire une contamination de l’organisme par l’épiderme et/ou par ingestion. Cette exposition peut alors entraîner des effets sur la santé propres aux polluants concernés et à ce mode d’exposition, tels que des effets cancérigènes et mutagènes, des infections mais aussi des allergies dont les dermatoses constituent une part importante des maladies liées au travail.
Dans ce cadre, les prélèvements surfaciques et cutanés pourraient représenter un outil préliminaire simple permettant d’évaluer l'exposition des travailleurs à certaines substances chimiques présentes sur les surfaces de leur environnement de travail direct.
Méthodologies utilisées
D’une façon générale, deux méthodologies principales de prélèvements de surface émergent depuis quelques années :
- des prélèvements à l’aide de lingettes, parfois appelés frottis de surface ou prélèvements par essuyage,
- des prélèvements effectués sur filtres par aspiration à débit constant à l’aide de pompes ou d’autres dispositifs (canisters par exemple).
Le prélèvement par aspiration est préférentiellement utilisé pour le prélèvement sur les surfaces rugueuses ou poreuses des composés particulaires et fibreux organiques ou inorganiques, alors que le mode de prélèvement par essuyage présente un champ d’action plus large (dépôts organiques liquides ou solides, dépôts inorganiques particulaires ou fibreux) pour des surfaces plus lisses.
Concernant ces deux méthodologies de prélèvement, il semble se dégager un consensus sur la surface de prélèvement optimale, à savoir un carré de 10 x 10 cm, qui correspond à environ une à deux fois la surface d’une paume de main.
Difficultés rencontrées
Cependant, ce domaine émergent d'évaluation des expositions humaines aux agents chimiques n’est actuellement pas suffisamment structuré et est confronté à de nombreux obstacles techniques liés à la très grande diversité des substances prélevables ainsi que des surfaces concernées. Compte tenu du peu de recul actuel dans ce domaine d’évaluation, ces difficultés entrainent un manque d’harmonisation et de standardisation des méthodologies et du matériel employés qui constitue un frein supplémentaire à l’utilisation et au développement de cette voie de caractérisation de l’exposition des travailleurs.
Une autre difficulté rencontrée réside dans l’interprétation des résultats et, principalement, dans la corrélation entre le résultat du prélèvement et l’absorption réelle des composés dans l’organisme.
Par ailleurs, il n’existe pas, à l’heure actuelle, de valeurs limites de référence, hormis pour le plomb, le béryllium et les polychlorobiphényls (PCB) pour lesquels l’Agence américaine de protection de l’environnement (USEPA) recommande des valeurs limites de prélèvement de surface. Cette absence de valeurs réglementaires finit également par freiner le développement et l’utilisation de ces méthodes. La notion de valeurs limites de surface (acceptable surface limits), équivalentes des valeurs limites atmosphériques, est aujourd’hui évoquée afin d’apporter un poids aux mesures issues de prélèvements de surface, et de pouvoir ainsi contribuer à leur développement et généralisation.
Pour l’heure, si le domaine du prélèvement de surface n’est pas assez structuré et manque d’harmonisation des pratiques, la volonté est forte d’aller vers une standardisation des méthodes de prélèvement afin, notamment, de pouvoir comparer les données à l’échelle globale.
Travaux de l’INRS
L’INRS s’est investi depuis quelques années dans l’évaluation de la contamination des surfaces par déposition de polluants atmosphériques. Ainsi, des travaux en cours visent :
- à développer des outils métrologiques et méthodologiques permettant d’optimiser et d’harmoniser les pratiques à travers une approche méthodique et rationnelle des prélèvements,
- à évaluer les taux de transfert par contact de polluants des surfaces contaminées vers les salariés (l’objectif étant d’apporter des éléments de connaissance pour pouvoir, à terme, relier les mesures de contaminations des surfaces à une exposition réelle des organismes).
Parallèlement, une meilleure connaissance des mécanismes de passage percutané permettrait de pouvoir relier la mesure du prélèvement surfacique à une absorption réelle par l’organisme et de proposer des valeurs limites de contaminations surfaciques indicatives ou réglementaires.