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Xylènes

Fiche toxicologique n° 77

Sommaire de la fiche

Édition : Juin 2021

Pathologie - Toxicologie

Les trois isomères ont des propriétés toxicocinétiques analogues et induisent des effets toxicologiques de nature et de puissance similaires.

  • Toxicocinétique - Métabolisme [2, 7, 25]

    Chez l’Homme comme chez l’animal, les xylènes sont principalement absorbés par inhalation, quel que soit l’isomère considéré, et se distribuent dans les tissus riches en lipides. La quasi-totalité des xylènes absorbés est métabolisée dans le foie pour former des acides méthylhippuriques, éliminés dans les urines.

    Chez l'animal
    Absorption

    Les isomères du xylène sont rapidement absorbés chez le rat, suite à une exposition par voie orale, avec un pic de concentration sanguine atteint 30 min à 2 heures après l’exposition ; un taux d’absorption de 90 % a été estimé. Ils sont aussi absorbés par voie pulmonaire.

    L’absorption percutanée a été déterminée in vitro avec de la peau de rat glabre (« hairless ») : elle est très faible, avec 0,22 % de xylène absorbé après 8 heures d’exposition, sous pansement occlusif [26].

    Distribution

    Les xylènes se distribuent dans les tissus riches en lipides comme les graisses et le cerveau ; des quantités importantes ont aussi été détectées dans les organes bien perfusés comme le foie et les reins [6]Tous les isomères du xylène traversent la barrière placentaire et se retrouvent dans le sang fœtal et le liquide amniotique.

    Métabolisme

    Même si le métabolisme chez l’animal est similaire à celui de l’Homme, il existe des différences quantitatives et au niveau du devenir des alcools méthylbenzoïques : la formation d’acides méthylhippuriques est prédominante pour les m- et p-xylène alors que pour l'o-xylène, la conjugaison avec l’acide glucuronique est majoritaire [5].

    Des méthylbenzaldéhydes, métabolites intermédiaires toxiques, ont été détectés chez le rat mais ne sont pas retrouvés chez l’Homme [27].

    Excrétion

    Quelle que soit la voie d’administration, les xylènes sont surtout excrétés dans les urines, sous forme d’alcools ou d’acides méthylbenzoïques, puis méthylhippuriques, et peuvent aussi être exhalés inchangés [5]. La demi-vie plasmatique est comprise entre 2,5 et 4 heures.

    Surveillance Biologique de l'exposition

    Les acides méthylhippuriques dans les urines en fin de poste sont des indicateurs spéci­fiques mais soumis à de grandes variations individuelles, bien corrélés à l’intensité de l’exposition. Des valeurs biologiques d’interprétation (VBI) professionnelles (établies sur la base de la relation entre les concentrations atmosphériques de xylènes et les concentrations urinaires d’acides méthylhippuriques) ainsi que des VBI issues de la population générale sont disponibles.

    D’autres dosages sont également proposés (dosage des xylènes dans le sang, dans les urines ou dans l’air expiré) mais ne pré­sentent pas d’avantage par rapport au dosage des acides méthylhippuriques. Il n’y a pas de VBI disponibles pour ces indicateurs.

  • Mode d'actions

     

     

  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë [10, 27]

    Les effets observés sont une hyperexcitabilité neurologique puis une dépression du système nerveux central. Chez le rat, on constate également une cytolyse hépatique. Les xylènes (en mélange ou isomères séparés) provoquent des irritations cutanée, oculaire et respiratoire.

    Les DL50 du xylène technique par voie orale sont comprises, chez le rat, entre 3500 et 8000 mg/kg. Concernant les isomères, la DL50 de l’o-xylène est de 3600 mg/kg, celle du m-xylène est comprise entre 4230 et 6700 mg/kg, et celle du p-xylène est comprise entre 3900 et 5000 mg/kg.

    La CL50 du xylène technique par inhalation chez le rat se situe entre 6350 et 6700 ppm pour une exposition de 4 heures. Concernant les isomères, la CL50 de l’o-xylène est comprise entre 4900 et 5300 ppm, celle du p-xylène entre 4550 et 4800 ppm et celle du m-xylène autour de 7300 ppm.

    Chez le lapin, une DL50 supérieure à 4350 mg/kg a été déterminée par voie cutanée pour le xylène technique. Concernant les isomères, la DL50 de l'o-xylène est supérieure à 3160 mg/kg, celle du m-xylène 12100 mg/kg ; aucune donnée n’est disponible pour le p-xylène.

    Aux concentrations létales (9900 ppm pendant 4 heures), une atélectasie (affaissement des alvéoles pulmonaires) avec hémorragie et œdème des poumons est observée chez le rat.

    Quelle que soit la voie d’exposition, les animaux présentent des signes d’hyperexcitabilité neurologique (ataxie, tremblements, spasmes) précédant une dépression du système nerveux central (prostration, coma). À la suite d’une exposition pendant 30 min à du m-xylène (rats, 2000 à 8000 ppm), un ralentissement de l’activité cérébrale, une perturbation de l’apprentissage, l’absence de perception de la douleur et une diminution des interactions sociales peuvent être constatés à partir de 4000 ppm. La coordination motrice est impactée uniquement à la plus forte concentration [34].

    Au niveau hépatique, le mélange des trois isomères du xylène est un inducteur d’une large variété d’enzymes qui augmente le contenu en cytochrome P450 (concentrations supérieures à 1000 ppm pendant au moins 5 jours). Dans la plupart des cas, cette augmentation se fait sans lésion histopathologique associée [27]. Une cytolyse hépatique dose-dépendante a été rapportée dans une étude où les rats avaient été exposés à des concentrations de 1000 à 2000 ppm pendant 4 heures. Par voie orale, suite à une exposition à 250-1000 ou 2000 mg/kg de chacun des isomères séparément (dans la nourriture pendant 10 jours), le poids du foie est augmenté à la plus forte dose pour les trois isomères. Aucune mortalité n’est observée avec les isomères m et o ; une mortalité de 20 % est rapportée chez les femelles exposées à la plus forte dose de p-xylène [35].

     

    Irritation, sensibilisation [36]

    L’application cutanée chez le lapin de xylènes, en mélange ou du p-xylène seul, entraîne une irritation modérée ou sévère (érythème et œdème, voire nécrose superficielle).

    En instillation oculaire chez le lapin, le m-xylène et un mélange de xylènes sont responsables d’une irritation conjonctivale légère à modérée.

    Un LLNA donne des résultats légèrement positifs avec le mélange de xylènes (indice de stimulation 3,1) [2].

    Chez la souris, on note des signes d’irritation respiratoire à partir de 1300 ppm qui sont plus marqués en fonction de la dose. Une diminution de 50 % de la fréquence respiratoire (RD50) est observée lors de l’exposition de souris à 1450 ppm d’o-xylène pendant 5 minutes. La fréquence respiratoire diminue à partir de 500 ppm pour le m-xylène chez la souris (RD50 = 1361 ppm, exposition de 6 minutes) ; le p-xylène est aussi un irritant respiratoire mais dans une moindre mesure [27].

    Toxicité subchronique, chronique [27]

    Il existe des données contradictoires chez le rat. Une toxicité hépatique et cardiaque a été observée chez le rat, et une toxicité rénale chez le lapin.

    • Par inhalation

    Une étude fait état de diverses atteintes chez des rats exposés à des concentrations élevées (810 ppm, 8 heures par jour, 6 jours par semaine pendant 110 à 130 jours) d’un mélange d’isomères : une paralysie des pattes postérieures, une perte de poids, une discrète diminution du taux des leucocytes, une augmentation de l’urée sanguine, une hématurie avec albuminurie et une hyperplasie médullaire. A l’autopsie, il a été constaté une discrète congestion des reins, des surrénales, du foie, du cœur, des poumons et de la rate, avec, au niveau rénal, une desquamation cellulaire glomérulaire et une nécrose tubulaire. Une diminution du nombre d’érythrocytes et une hausse du nombre de leucocytes ont été mesurées chez des rats exposés à 100 ppm de m-xylène (6 h/j, 5 j/sem pendant 3 mois) [37]. Une augmentation du nombre de leucocytes a aussi été mise en évidence chez le rat, suite à une exposition à de l’o-xylène (760 ppm, 8 h/j, 5 j/sem, pendant 6 semaines) [38].

    Ces atteintes n’ont pas été confirmées par la plupart des travaux ultérieurs conduits chez des rats, des chiens et des singes ; ces travaux n’ont pas révélé de modifications du poids, d’anomalies histologiques des principaux organes ni de perturbation de la numération formule sanguine lors d’expositions aux xylènes à des concentrations variables, de 80 à 800 ppm, 6 à 8 heures par jour, 5 à 7 jours par semaine pendant 3 mois.

    Des anomalies hépatiques mal précisées ont été notées chez le rat exposé à 1100 ppm, 8 heures par jour, 7 jours par semaine pendant 1 an. Une augmentation de l’activité enzymatique hépatique et une augmentation de la taille du foie ont été rapportées chez des rats exposés à 1075 ppm d'o-xylène (8 h/j, 7 j/7, pendant 1 an) : les observations au microscope électronique ont révélé une augmentation importante du nombre de peroxysomes et une prolifération du réticulum endoplasmique dans les hépatocytes [39].

    Un épaississement de paroi des artères coronaires, une perturbation de la fréquence cardiaque et des cas d’asystolie ont été rapportés chez des rats exposés à 230 ppm de xylènes (6 h/j, 5 j/sem, pendant 4 semaines) [40].   

     

    • Par voie orale

    Des effets hépatiques, rénaux et respiratoires ont été aussi rapportés chez le rat et la souris dans quelques études, suite à une exposition par voie orale.

    Le poids des reins a augmenté chez des rats, suite à une exposition à 800 mg/kg/j de m-xylène (5 j/sem, 3 semaines) et suite à une exposition à un mélange de xylènes (gavage, 150-750 ou 1500 mg/kg/j, 90 jours), associée à une légère atteinte chronique (dilatation des tubules et atrophie) uniquement chez les femelles [35, 41].

    L’augmentation du poids du foie a été observée chez des rats mâles et femelles, suite à une exposition à respectivement 750 et 150 mg/kg/j d’un mélange de xylènes (gavage, 150-750 ou 1500 mg/kg/j, 90 jours). Cette hépatomégalie était accompagnée d’une légère augmentation des taux d’aspartate aminotransférase (uniquement chez les femelles à 1500 mg/kg/j) et d’alanine aminotransférase (à 1500 mg/kg/j chez les mâles et à 750 et 1500 mg/kg/j chez les femelles) [35].

    Des souris ayant ingéré 200 mg/kg/j de xylène (5 j/sem, 13 sem) ont présenté des difficultés à respirer [47]. Le nombre de cytochromes P-450 pulmonaires a diminué chez des rats exposés à 800 mg/kg/jour de xylène (gavage, 5 j/sem, 3 sem) [41].

    Effets génotoxiques [6, 7, 27]

    Les tests réalisés in vitro et in vivo sont négatifs.

    In vitro

    Chez les procaryotes et les levures, les xylènes (qu’il s’agisse du xylène technique ou des isomères) testés avec ou sans activation métabolique n’entraînent ni mutation génique, ni aberrations chromosomiques. Les études réalisées sur lymphocytes humains (échange de chromatides sœurs et aberrations chromosomiques) ou de souris (test de locus spécifique) et sur des cellules ovariennes de hamster chinois (échange de chromatides sœurs, aberrations chromosomiques) ont toutes donné des résultats négatifs, avec ou sans activation.

     

    In vivo

    Par inhalation, aucun échange de chromatides sœurs n’a été observé dans des lymphocytes humains (à la suite de 3 expositions de 40 ppm d’un mélange de xylènes, pendant 7 heures). 

    Un test par voie cutanée chez le rat a montré une augmentation de l'incidence des dommages à l'ADN (application de 250 μL de m-xylène pendant 1 heure) [42]. Étant donné que c’est le seul résultat positif disponible dans la littérature, il est probable que ces dommages soient causés par la cytotoxicité provoquée plutôt que par un effet direct du m-xylène sur l'ADN.

    Une étude par voie orale n'a pas montré d'augmentation de l'incidence des aberrations chromosomiques et des micronoyaux dans des réticulocytes de souris (doses uniques allant jusqu'à 1 g/kg).

    De même, les tests réalisés par voie intra-péritonéale ne montrent aucun effet génotoxique (aberrations chromosomiques sur moelle osseuse de rat, micronoyau sur érythrocytes de moelle osseuse de souris).

    Effets cancérogènes [32]

    Aucune donnée n’est disponible par inhalation. Par voie orale ou cutanée, les données actuelles sont très limitées et ne permettent pas de conclure.

    Trois études de cancérogenèse ont été effectuées par gavage. Dans deux de ces études utilisant du xylène technique, l’une chez la souris (recevant 0, 500 ou 1000 mg/kg par jour, 5 jours par semaine, jusqu’à 2 ans), l’autre chez le rat (recevant 0, 250 ou 500 mg/kg par jour, 5 jours par semaine, jusqu’à 2 ans), il n’a pas été observé d’augmentation de l’incidence des cancers chez les animaux traités. Une étude chez le rat recevant 500 mg/kg par jour d’un mélange d’isomères, 4 à 5 jours par semaine pendant 104 semaines a montré une augmentation de fréquence des tumeurs malignes tout type confondu chez les animaux traités par rapport aux témoins. Cependant, les résultats de cette étude sont difficiles à interpréter en raison notamment de la méthodologie utilisée.

    Dans une étude ancienne, l’application sur la peau de souris d’un mélange d’isomères n’a pas mis en évidence d’effet promoteur ou initiateur des cancers cutanés.

    Le CIRC a classé les xylènes dans le groupe 3 des agents inclassables quant à leur cancérogénicité pour l’Homme.

    Effets sur la reproduction [2, 6, 31]

    Concernant les effets sur la fertilité des xylènes, le peu de données disponibles à ce jour ne permet pas de les évaluer de manière adéquate. Les xylènes sont embryolétaux et foetotoxiques chez le rat et la souris à doses élevées, non toujours toxiques pour les mères ; ils sont aussi à l’origine d’effets neurologiques postnataux.

    Fertilité

    Très peu d’informations sont disponibles concernant les effets des xylènes seuls sur la fertilité.

    Dans un rapport industriel non publié, dans lequel des rats ont été exposés par inhalation à des concentrations allant jusqu'à 500 ppm (2,4 % toluène, 12,8 % éthylbenzène, 20,3 % p-xylène, 44,2 % m-xylène et 20,4 % o-xylène ; 6 h/j ; avant l’accouplement, pendant la gestation et la lactation), aucun effet sur la fertilité, le poids des organes reproducteurs ou les paramètres de reproduction n'a été observé [27].

    Dans un autre rapport industriel, des rats ont été exposés à un mélange de xylènes composé de 12,8 % d’éthylbenzène, 20,4 % d’o-xylène, 44,2 % de m-xylène et 20,3 % de p-xylène (0, 60, 250 et 500 ppm, 6 h/j, 7 j/sem, 131 jours en période pré-accouplement puis 20 jours pendant l'accouplement ; les femelles étaient de plus exposées du 1er au 20e jour de gestation et du 5e au 20e jour de lactation). Un ralentissement significatif du gain de poids est mesuré chez les femelles exposées à 60 et 250 ppm, pendant la période d'accouplement, sans lien avec le traitement d’après les auteurs. L'indice d'accouplement a été significativement réduit à 250 ppm et à 500 ppm ; aucun effet sur la durée moyenne de la gestation, la taille des portées ou le taux de survie n'a été rapporté [25].

    Aucune étude n’est disponible par voie orale ou cutanée.

    Développement

    Plusieurs études effectuées chez le rat et la souris montrent que les xylènes exercent une action embryolétale et fœtotoxique à des doses élevées mais pas obligatoirement toxiques pour la mère (par exemple pour une administration orale de 2000 mg/kg par jour du 6e au 15e jour de gestation chez la souris ou lors d’une exposition à 230 ppm du 9e au 14e jour de gestation chez le rat). On observe en outre des retards de croissance fœtale et d’ossification et des malformations squelettiques (fentes palatines, côtes surnuméraires...). Ces effets ne sont pas retrouvés lors d’expositions à de plus faibles concentrations (par exemple à 35 ppm, 24 heures par jour, du 7e au 14e jour de gestation dans une étude chez le rat). Toutefois, la qualité d’un grand nombre de ces études empêche de tirer des conclusions.

    Une étude de développement prénatal a été réalisée selon les lignes directrices recommandées par l’OCDE.  Des rats ont été exposés à un mélange de xylènes (15,3 % éthylbenzène, 21,3 % o-xylène, 43,9 % m-xylène et 19,4 % p-xylène) ou à chacun des isomères individuellement (0, 100, 500, 1 000 et 2 000 ppm ; 6 h/j ; GD6 à GD20). Toutes ces substances ont entrainé une toxicité maternelle avec un ralentissement du gain de poids à 1000 et 2000 ppm. Une diminution du poids de l’utérus et de la consommation de nourriture a aussi été constatée à 1000 et 2000 ppm d'o-, de m- et de p-xylène, et à 2000 ppm pour le mélange de xylènes. Aucun effet tératogène n’a été observé, même à la plus forte concentration, quelle que soit la substance testée. Chez les nouveau-nés, une diminution significative du poids fœtal a été mesurée aux concentrations supérieures à 500 ppm d’o-xylène ou du mélange, et à partir de 1000 ppm pour le m- et p-xylène. L’incidence des fœtus présentant des variations squelettiques augmente significativement à 2000 ppm pour l'o- et le p-xylène. Aucun effet n’a été constaté sur le nombre de sites d'implantation par portée, le pourcentage de fœtus vivants, le pourcentage de résorptions, la proportion de mâles par portée ainsi que l'incidence des malformations squelettiques, viscérales ou externes [43].

    Suite à une exposition prénatale (500 ppm xylène technique, 6 h/j, GD7-20), les facultés d’apprentissage et de mémorisation, ainsi que la coordination motrice, sont diminuées à l’âge de 16 et 28 semaines ; à 55 semaines, les effets ne sont plus significativement différents, signe d’une réversibilité ou d’une adaptation des rats aux exercices réalisés [44, 45].

    Des souris ont été gavées par un mélange de xylènes (3 fois par jour ; 60,2 % m-xylène, 9,1 % o-xylène, 13,6 % p-xylène et 17,0 % éthylbenzène; 0, 0,52, 1,03, 2,06, 2,58, 3,10 et 4,13 mg/kg/j dilué dans de l'huile de graines de coton; GD6 à 15). Toutes les mères exposées à la plus forte dose sont mortes ainsi que 12 des 38 mères recevant 3,10 mg/kg, celles encore en vie présentant un gain de poids réduit ; une diminution significative du poids de l'utérus et du foie a aussi été mesurée à 2,06, 2,58 et 3,10 mg/kg. Le poids fœtal moyen a été diminué à 2,06, 2,58 et 3,10 mg/kg ; à ces doses, le pourcentage de fœtus présentant des malformations externes était significativement plus élevé, la fente palatine étant la malformation la plus fréquente. Le pourcentage de fœtus morts et celui de résorptions par rapport au nombre total d'implants étaient significativement plus élevés à 3,10 mg/kg. Aucune augmentation significative de l'incidence des malformations viscérales ou squelettiques n’a été observée [46].

    Neurotoxicité

    Quelle que soit la voie d’exposition, les xylènes agissent au niveau du système nerveux central et sont à l’origine d’effets neurocomportementaux. Les concentrations élevées entrainent également des effets ototoxiques.

    Par voie orale

    De nombreuses études ont rapporté des spasmes et des changements de comportement (impulsivité, agressivité) chez le rat, tandis que chez la souris, ont été rapportés des tremblements, une paralysie partielle des pattes postérieures et une faiblesse généralisée.

    Chez la souris, l’ingestion de 400 mg/kg/j d’un mélange de xylènes a entrainé incoordination, diminution de la force dans les pattes postérieures et tremblement ; à 1000 mg/kg/j, une hyperactivité est observée (gavage, 13 semaines) [47].

    Un comportement agressif a été constaté chez des rats exposés à 1 500 mg/kg/j d’un mélange de xylènes pendant 90 jours [35].

     

    Par inhalation

    Des modifications biochimiques ont été détectées au niveau du cerveau de rats (800 ppm d’un mélange de composition non précisée, en continu pendant 30 jours) : hausse des taux de glutamine et de norépinéphrine, respectivement, dans le mésencéphale et l’hypothalamus, diminution des taux d’acétylcholine au niveau du striatum [48]. Une augmentation du taux d’enzymes présentes dans le cerveau et des changements de comportement ont aussi été rapportés chez des rats exposés à 300 ppm d’un mélange de xylènes pendant 18 semaines [49, 50].

    Concernant le m-xylène, les rats mâles exposés à 100 ppm pendant 3 ou 6 mois, ont présenté une diminution de l’activité motrice, une incoordination et des difficultés d’apprentissage [51, 52]. Une diminution de la coordination motrice ainsi qu’une augmentation de la sensibilité à la douleur ont aussi été rapportées chez des rats suite à une exposition à 50 et 100 ppm de m-xylène pendant 3 mois (6 h/j, 5 j/sem) [37].

    Chez la souris, une diminution de la liaison aux récepteurs alpha-adrénergiques a été notée pour le m-xylène (1600 ppm, 4 h/j, 5 j/sem pendant 7 semaines) [40]

    Aucune étude n’est disponible concernant l'o-xylène ou le p-xylène.

    Parmi les 3 isomères, seul le p-xylène induit une cochléotoxicité modérée à sévère chez le rat, à partir de 900 ppm (6 h/j, 6 j/sem pendant 13 semaines) : elle se caractérise par une perte de cellules ciliées [53]. Un mélange de xylènes (20 % d'o-xylène, 20 % de p-xylène, 40 % de m-xylène et 20 % d’éthylbenzène) produit les mêmes effets à 1000 ppm (6 h/j, 6 j/sem pendant 13 semaines) [54].

    Une augmentation des seuils auditifs a par ailleurs été observée chez des rats exposés à 800 ppm de xylène technique (14 h/j, 7 j/sem, 6 sem) [55]. Des effets similaires sont rapportés uniquement pour le p-xylène par voie orale (900 mg/kg pc/j, 5 j/sem, 2 semaines) [56].

    Des effets modérés sur le réflexe stapédien (mécanisme de protection de l’oreille interne permettant d’atténuer les bruits) ont été mis en évidence pour les isomères p- et m-, suite à une exposition de rats à 3000 ppm pendant 15 minutes ; l'o-xylène n’a aucun effet sur ce mécanisme [57]

    Très récemment, la vestibulotoxicité de l'o-xylène a été mise en évidence in vitro, dans un nouveau modèle cellulaire [58].

  • Toxicité sur l’Homme

    La toxicité aiguë comprend des effets neurologiques et d'irritation des muqueuses (oculaire, nasale et pharyngée), l’exposition des yeux pouvant être à l’origine de kératites. La toxicité chronique se caractérise surtout par un syndrome psycho-organique et une dermatite d’irritation. Les xylènes sont possiblement ototoxiques. Les tests de génotoxicité réalisés sont majoritairement négatifs. Les données disponibles ne permettent pas de statuer formellement sur la cancérogénicité ou sur la reprotoxicité propre des xylènes, mais des atteintes sur la fertilité et le développement, notamment en lien avec l’effet famille des solvants organiques, ne peuvent pas être écartées.

    Toxicité aiguë [6, 7, 28, 60]

    Par inhalation, les principaux effets décrits au cours d'expositions aiguës à des vapeurs de xylènes, que ce soit lors d'expositions professionnelles ou lors d'expositions humaines contrôlées, sont des effets neurologiques et des signes d'irritation des muqueuses (oculaire, nasale et pharyngée).

    Les symptômes neurologiques les plus fréquents sont d’abord des céphalées et une asthénie apparaissant pour des concentrations de l’ordre de 50–200 ppm, puis une sensation de vertiges, étourdissements, des troubles de l’équilibre et une confusion accompagnée de nausées, d’un ralentissement des fonctions psychomotrices et, enfin, lors d’exposition à de très fortes concentrations, un coma, voire le décès.

    L’effet irritant des xylènes sur le tractus respiratoire et les yeux a été observé à partir de 50 ppm, pendant des durées d’exposition variables (quelques minutes à quelques jours).

    Une atteinte hépatorénale a été observée dans des cas d’exposition accidentelle à de très fortes concentrations. Aucun effet sur la fréquence cardiaque, la pression artérielle et la fonction cardiaque n’a été relevé, mais des cas d’intoxication mortelle ont été attribués à une sensibilisation myocardique aux catécholamines et à des phénomènes anoxiques associés.

    Au niveau oculaire, en plus des signes d’irritation, des kératites vacuolaires épithéliales et/ou stromales peuvent être observées suite à l’exposition à de fortes concentrations de vapeurs de xylène ou suite à des projections oculaires de xylènes liquides [61].

    Au niveau cutané, l’immersion des mains pendant 20 minutes dans les xylènes liquides provoque une sensation de brûlure dès 10 minutes et un éry­thème, régressant après la fin de l’exposition. Le contact cutané prolongé (7 – 8 heures, mélange contenant plus de 95% d’o-xylène) est à l’origine de brûlures chimiques caractérisées par douleur, paresthésies et difficultés aux mouvements de flexion, traduites cliniquement par une dévitalisation des tissus avec épaississement de la peau, troubles trophiques et sensoriels [62].

    L’injection sous-cutanée accidentelle peut être à l’origine d’une fasciite nécrosante [63].  

    L’ingestion entraîne des troubles digestifs (douleurs abdominales, nausées puis vomissements suivis de diarrhées), une dépression du système nerveux central (syndrome ébrieux puis troubles de la conscience, voire coma convul­sif en cas de prise massive), une pneumopathie d’inhalation dont les premiers signes sont radiologiques (opacités floconneuses avec bronchogramme aérien le plus souvent localisées aux lobes moyen et inférieur droits mais parfois diffuses dans les deux champs pulmonaires évoquant un œdème interstitiel et alvéolaire, dans les 8 heures suivant l’ingestion). Les signes cliniques respiratoires (toux, dyspnée), ainsi que la fièvre sont plus tardifs, régressant en 2 ou 3 jours, en l’absence de surinfection.

    Toxicité chronique [6, 7, 28]

    Le système nerveux central est le principal organe cible. Le syndrome psycho-organique, à un stade réversible ou irréversible, a été associé à l’exposition chronique à des mélanges de solvants dont les vapeurs de xylène étaient les composants majoritaires. Il est caractérisé par des troubles de la mémoire et de la concentration, une insomnie, une diminution des performances intellectuelles et des troubles de la personnalité, sans signe objectif. Les travailleurs rapportaient aussi plus souvent d’autres symptômes neurologiques (céphalées, une sensation d'ébriété, fatigue, irritabilité, anxiété) et irritatifs (irritation nasale et oculaire, maux de gorge).

    En raison de l’utilisation concomitante d’autres solvants, de la mauvaise quantification de l’exposition et de divers problèmes méthodologiques, l’attribution de ces effets aux xylènes seuls reste difficile à établir.

    Des symptômes digestifs (nausées, vomissements) et cardiovasculaires (palpitations, douleurs thoraciques avec anomalies à l’ECG) ont été rapportés chez des travailleurs exposés à des concentrations non précisées de xylènes dans un contexte de polyexposition chimique.

    Une faible exposition professionnelle chronique aux xylènes (14 ppm pendant 7 ans) ne semble pas associée à des effets hépatorénaux ni hématologiques. Cependant, l’exposition professionnelle aux toluène/xylènes a été associée à l’aggravation de certaines néphropathies glomérulaires [64]. Les observations anciennes rapportant des effets hématologiques et médullaires lors d’expositions au xylène étaient probablement dues à une contamination du produit technique par du benzène.

    Sur la peau, les xylènes ont une action dégraissante, à l’origine de dermatites d’irritation (rougeur, desquamation, fissurations). Des rares cas d’urticaire, sans signes respiratoires associés, chez des travailleurs exposés à des vapeurs de xylènes ou par contact cutané direct sont rapportés [65].

    Des altérations de la fonction auditive ont été mises en évidence chez des travailleurs en laboratoire d’histologie (mélange de xylènes contenant 21% de p-xylene, concentration moyenne de 8,3 ppm, allant de 1,8 à 49 ppm). Par rapport à un groupe non exposé, les travailleurs avaient des performances auditives diminuées, et ceux ayant une plus forte exposition cumulée avaient les résultats les plus mauvais [66]

    L’exposition aux solvants organiques a été associée à un risque plus élevé de sclérodermie systémique mais ce risque n’est pas retrouvé pour l’exposition spécifique aux xylènes [67]. Ils ont cependant été associés au phénomène de Raynaud [68].

    Effets génotoxiques [6, 33]

    Les rares données humaines disponibles ne montrent pas d’augmentation d’échanges de chromatides sœurs ou d’aberrations chromosomiques dans les lymphocytes du sang périphérique de travailleurs exposés aux xylènes par inhalation.

    Une augmentation des lésions de l’ADN au test des comètes a été observée chez 18 travailleurs en laboratoire d’histologie exposés à des solvants organiques, principalement du xylène (sans précision) par voie cutanée et respiratoire (par rapport à 11 témoins), ainsi que chez 17 travailleurs d’une usine de polymères (par rapport à 17 témoins). La responsabilité d’autres substances (formaldéhyde, styrène) que les xylènes dans l’effet observé ne peut être formellement exclue [69, 70].

    Effets cancérogènes [6, 33]

    Peu de données sont disponibles concernant le potentiel cancérogène des xylènes. Il s’agit essentiellement d’études évaluant le risque d’hémopathie maligne. Dans une méta-analyse portant sur 9 études cas-témoin, il a été mise en évidence une association entre l'exposition aux xylènes et l'augmentation du risque de myélome multiple. Dans une cohorte rétrospective de 14457 travailleurs, aucun des 108 travailleurs exposés aux xylènes n’est mort de myélome ou de lymphome non-hodgkinien. Concernant les autres types de cancer, des études cas-témoins rapportent un excès de risque de cancer colorectal (une étude), de la prostate (une étude) et du poumon (une étude).

    Le nombre limité de cas étudiés, la mauvaise caractérisation des expositions, la présence d’autres substances chimiques et la forte corrélation avec les expositions à différents solvants (toluène, styrène, benzène, etc.) ne permettent pas d’apprécier de façon conclusive un éventuel pouvoir cancérogène des xylènes chez l’Homme.

    Effets sur la reproduction [6, 28, 32, 33, 71]

    Les données humaines disponibles investiguant les potentiels effets sur la fertilité ou le développement d’une exposition professionnelle aux xylènes sont peu concluantes au regard des faibles effectifs exposés aux xylènes seuls, de leurs résultats divergents et des biais méthodologiques. L’exposition aux xylènes étant étroitement corrélée à celles d’autres produits chimiques, notamment à d’autres hydrocarbures aromatiques (benzène, toluène, étylbenzène), la distinction des effets induits par les xylènes de ceux résultants d’une exposition à d’autres solvants s’avère complexe [6].

    Concernant la fertilité masculine, l’exposition aux xylènes n’était pas associée au délai de conception. Parmi les paramètres spermatiques analysés chez 24 travailleurs, seule une diminution statistiquement significative des γ-GT séminales, indicative d’un fonctionnement prostatique altéré, a été associée au xylène sanguin, par rapport à 37 témoins.

    Concernant la fertilité féminine, des troubles menstruels ont été observés chez des femmes exposées à moins de 100 ppm de xylènes et à d’autres solvants. L’exposition aux xylènes n’était pas associée au délai de conception, mais l’exposition aux solvants organiques dans leur ensemble était associée à un temps de conception plus long et à une baisse de la fécondité.

    Concernant le risque d’avortements spontanés et de faible poids à la naissance, l’association avec l’exposition aux xylènes n’est pas retrouvée systématiquement.

    Aucune des études disponibles ne met en évidence d’association significative entre l’exposition des mères ou des pères aux xylènes et le risque de malformations congénitales, notamment de fente palatine.

    Concernant les effets neurodéveloppementaux (fonctions cognitives, déficits d’apprentissage, troubles de l’activité avec déficit de l’attention, troubles du spectre autistique) chez la descendance, la divergence des résultats et plusieurs limites (protocole des études, caractérisation de l’exposition, coexposition à d’autres agents neurotoxiques) rendent difficile l’imputation des effets observés aux seuls xylènes.

  • Interférences métaboliques [25]

    Le métabolisme des xylènes est augmenté par les inducteurs enzymatiques comme le phénobarbital et le 3-méthylcholantrène.

    L’aspirine et les xylènes entrent en compétition lors de la conjugaison avec la glycine, ce qui a pour conséquence de diminuer l’excrétion urinaire d’acides méthylhippuriques (affinité enzymatique plus importante pour l’aspirine). De nombreuses substances industrielles peuvent interagir de la même manière avec les xylènes, comme l’éthylbenzène ou le 1,1,1-trichloroéthylène, et entrer en compétition lors de leur métabolisme : les métabolites des xylènes sont alors excrétés plus lentement et en moindre quantité.

    Le consommation d’éthanol (0,8 g/kg) avant une exposition de 4 heures aux vapeurs de xylènes (145 et 280 ppm) entraîne une diminution de 50 % de l’excrétion d’acides méthylhippuriques tandis que la concentration sanguine de xylènes s’élève d’environ 1,5 à 2 fois (préférence métabolique pour l’alcool). En même temps, les effets secondaires de l’éthanol sont augmentés.

    Lors d’une coexposition xylènes – tétrachlorométhane, les effets hépatiques liés au tétrachlorométhane sont exacerbés chez le rat (via une induction enzymatique, avec production accrue d’un métabolite toxique).

  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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