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Acide acrylique

Fiche toxicologique n° 233

Sommaire de la fiche

Édition : Février 2023

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme [11-17]

    L’acide acrylique est bien absorbé par voie orale, peu par voie inhalatoire et par voie cutanée, en fonction du pH, du solvant et de la concentration. Il est distribué dans tout l’organisme et est métabolisé rapidement dans le foie et les reins. Il est rapidement et majoritairement éliminé sous forme de dioxyde de carbone dans l’air expiré, plus faiblement via les urines et les fèces sous forme de métabolites.

    Chez l'animal
    Absorption

    L’absorption digestive de l’acide acrylique a lieu dans l’es­tomac; elle est rapide et quasi-complète puisqu’environ 90 % de la dose administrée au rat par intubation gas­trique sont absorbés au bout d’une heure.

    La plus grande partie de l’acide acrylique inhalé par le rat se dissout dans le mucus des fosses nasales et du naso­pharynx avant d’être absorbée au niveau de l’estomac. Une faible partie seulement atteint le poumon pour y être absorbée.

    Après application cutanée chez le rat, l’acide acrylique qui ne s’est pas évaporé du site d’application est absorbé rapi­dement et complètement si l’on utilise un solvant appro­prié (acétone) et une concentration suffisante (4 %, v/v). La pénétration cutanée estfonction du solvant et du pH dans le cas d’une solution aqueuse ; ainsi la pénétration relative à travers un échantillon de peau humaine excisée est de 1 avec un tampon phosphate (pH = 7), de 23 avec un tam­pon phosphate (pH = 6), de 15 avec l’éthylène-glycol et supérieure à 600 avec l’acétone. La pénétration cutanée diminue avec l’augmentation du pH, ce qui est cohérent avec une diminution du coefficient de partage eau/octanol. Indépendamment de la nature du solvant, l’absorp­tion cutanée augmente avec la concentration en acide acrylique.

    Après administration orale d’une dose unique d’acide acrylique radiomarqué chez le rat, la radioactivité est retrouvée au bout de 72 h à des concentrations plus éle­vées dans le foie, le tissu adipeux et à un moindre degré dans le cerveau et les reins.

    La biotransformation est rapide et quasi complète. Le foie et les reins sont les principaux sites de métabolisation. L’acide acrylique emprunte la voie naturelle du catabo­lisme mitochondrial oxydatif de l’acide propionique.

    Ce produit endogène qui résulte de l’oxydation des acides gras à nombre impair d’atomes de carbone et des acides amines à chaîne ramifiée est métabolisé selon deux voies. Une voie majeure, dépendante de la vitamine B12, conduit à la formation du succinyl-coenzyme A via le méthylmalonyl-coenzyme A alors qu’une voie mineure, indépendante de la vitamine B12, aboutit à la production d’acétylcoenzyme A. L’oxydation de l’acide acrylique est assurée par la voie mineure du catabolisme oxydatif de l’acide propionique à partir de l’acrylyl-coenzyme A avec production intermédiaire d’acide 3-hydroxypropionique et ultime de dioxyde de carbone et d’acétyl-coenzyme A. Le premier est éliminé dans l’air expiré et le second est incor­poré dans les constituants cellulaires via le cycle tricarboxylique de Krebs.

    La conjugaison de l’acide acrylique avec le glutathion est une voie mineure de biotransformation ; elle n’intervient qu’en cas de saturation de la voie métabolique précé­dente. On a définitivement exclu un rôle des systèmes oxydatifs des microsomes et la formation d’un époxyde dans la métabolisation de l’acide acrylique par le rat.

    Excrétion

    L’élimination est rapide. Environ 80 % d’une dose unique de 400 mg/kg administrée par voie orale au rat sont éli­minés dans l’air expiré, sous forme de dioxyde de carbone, dans les premières 24 heures.

    Les fractions urinaire et fécale d’excrétion sont respective­ment de 5 % et 9 %. Le principal métabolite urinaire est l’acide 3-hydroxypropionique.

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë [11, 12]

    Par voie orale, l’acide acrylique est corrosif pour les voies digestives chez le rat. Sous forme non diluée, il est irritant voire corrosif pour la peau et responsable d’atteintes cornéennes irréversibles chez le lapin. Il n’est pas sensibilisant chez le cobaye.

    L’acide acrylique est nocif par voie orale et dermique.

    La DL50 par voie orale est comprise entre 193 et 3200 mg/kg chez le rat. La grande variabilité de cette valeur est attribuable à la forme sous laquelle l’acide acry­lique a été administré (non dilué, en solution neutralisée ou non) et de ce fait à la sévérité de son action corrosive sur le tube digestif.

    Chez le lapin, la DL50 par application cutanée est com­prise entre 300 et 950 mg/kg.

    La plus faible CL50 publiée est de 1200 ppm (3 600 mg/m3) chez le rat exposé aux vapeurs d’acide acrylique.

    Ce sont les manifestations locales d’irritation et de corro­sion qui prédominent dans les essais de toxicité aiguë.

    Lorsqu’il est appliqué sous forme non dilué, l’acide acry­lique exerce chez le lapin une action corrosive cutanée. Sous cette forme, l’acide acrylique produit chez le lapin une irritation oculaire sévère avec atteinte irréversible de la cornée qui apparaît dans les 24 h qui suivent son instillation dans le cul-de-sac conjonctival.

    L’acide acrylique est un irritant sensoriel qui provoque une diminution de 50 % de la fréquence respiratoire par bra­dypnée expiratoire réflexe chez la souris et le rat, aux concentrations respectives de 685 et 513 ppm.

    Dans la majorité des essais expérimentaux pratiqués chez le cobaye, l’acide acrylique n’a pas exercé d’action sensibi­lisante cutanée. Les propriétés allergisantes cutanées de certaines préparations commerciales ont été attribuées à la présence d’acide a,p-diacryl-oxypropionique produit lors de la synthèse de l’acide acrylique.

    Toxicité subchronique, chronique [11, 12, 18]

    Chez le rat, l’acide acrylique non dilué peut être mortel par voie orale, avec des atteintes digestive, pulmonaire et rénale à l’histologie. L’exposition chronique via l’eau de boisson par voie orale entraine des effets sur le poids corporel et de différents organes, sans atteinte histologique chez le rat. Une irritation locale et des réactions inflammatoires sont possibles chez la souris lors d’expositions par inhalation. Des réactions cutanées sont observées chez la souris après application d’une solution d’acide acrylique.

    Chez le rat, l’administration orale d’acide acrylique non dilué par intubation gastrique aux doses de 150 et 375 mg/kg (5 j/sem, 3 mois) a entraîné une mortalité chez respectivement 60 % et 90 % des animaux mâles et femelles à la dose supérieure et une mortalité de 50 % des animaux des deux sexes à la dose inférieure. L’examen macroscopique et microscopique a révélé, chez tous les animaux, une hyperémie et une érosion de la muqueuse gastrique, une pathologie pulmonaire avec œdème et/ou emphysème. Une nécrose des tubules rénaux n’a été observée que chez les animaux qui succombaient.

    Lorsque l’acide acrylique est introduit dans l’eau de bois­son, sa toxicité orale subchronique chez le rat est considé­rablement réduite. Un traitement aux concentrations de 0, 120, 800, 2000 et 5000 ppm d’acide acrylique dans l’eau de boisson (0, 10, 60, 150 et 375 mg/kg/j) se traduit uniquement par une diminution de la consommation d’eau et de nourriture et par un retard de la croissance aux doses supérieures à 60 mg/kg/j. Ces manifestations sont en grande partie attribuables à l’odeur et au goût désagréables des solutions d’acide acrylique.

    Une exposition réitérée plus conséquente via l’eau de boisson (750 mg/kg/j) pendant 3 mois a entraîné chez le rat une baisse du poids corporel, une diminution du poids de différents organes (foie, reins, rate, cœur, cerveau, tes­ticules) en l’absence de toute lésion tissulaire à l’examen microscopique, une élévation sanguine de l’urée, de l’acti­vité de certains systèmes enzymatiques (phosphatases alcalines, aspartate transaminase) et une protéinurie. Dans cette étude, on a estimé la dose sans effet à 83 mg/kg/j. Chez la souris, l’application de 100 µl d’une solution d’acide acrylique à 4 % dans l’acétone, 3 fois par semaine, pendant 13 semaines a été à l’origine de réac­tions inflammatoires et de dégénérescences au niveau de l’épiderme et du derme qui ont débuté après 2 semaines d’exposition et ont persisté jusqu’à la fin du traitement. Aucune action toxique systémique n’a résulté de ce traite­ment. Lorsque la concentration est réduite à 1 %, l’action cutanée est minimale.

    L’exposition réitérée de rats et de souris aux vapeurs d’acide acrylique (5, 25 et 75 ppm, 6 h/j, 5 j/sem., 13 sem.) n’a pas causé de toxicité systémique mais uniquement des effets locaux d’irritation avec une inflammation et des dégénérescences focales de l’épithélium olfactif asso­ciées à une réaction inflammatoire et hyperplasique des glandes sous-muqueuses. La concentration atmosphé­rique sans effet a été estimée à 25 ppm chez le rat et inférieure ou égale à 5 ppm chez la souris.

    Effets génotoxiques [11, 12, 19, 20]

    Des tests in vitro se sont révélés positifs sur cellules de lymphome de souris (augmentation du nombre de cellules mutantes et effets clastogènes, augmentation des aberrations chromosomiques). In vivo, les tests sont négatifs.

    In vitro, l’acide acrylique n’a pas provoqué de mutation génique ponctuelle dans trois essais bactériens conduits chez Salmonella typhimurium, ni dans deux essais prati­qués sur cellules de mammifères (cellules ovariennes de hamster chinois CHO) lorsqu’il a été testé aux doses maxi­males non cytotoxiques, en présence et en l’absence de système d’activation métabolique.

    Les fibroblastes d’embryons de hamster syrien (SHE) n’ont pas répondu par des effets clastogènes ni par un proces­sus de transformation cellulaire à l’exposition in vitro à l’acide acrylique. L’acide acrylique n’induit pas non plus de synthèse non programmée de l’ADN sur ce système fibro­blastique ou sur hépatocytes primaires de rats.

    Dans un essai mené sur cellules de lymphome de souris (L5718Y), l’acide acrylique a été responsable, en l’absence de système d’activation métabolique, à la fois d’une augmentation du nombre de cellules mutantes et d’effets clastogènes. Une augmentation des aberrations chromo­somiques a été également constatée dans un essai prati­qué sur CHO en présence et en l’absence de système d’activation métabolique.

    In vivo par contre, on n’observe pas d’effet mutagène que ce soit sur cellules germinales ou somatiques. Ainsi, son administration unique ou réitérée (3 à 5 jours) n’a pas induit de mutation létale récessive liée au sexe chez la drosophile melanogaster, ni de létalité dominante chez la souris ni d’effet clastogène dans un essai cytogénétique pratiqué sur la moelle osseuse de rat. Enfin il ne provoque pas la formation d’adduits chez le rat après administration orale ou cutanée.

    Effets cancérogènes [11, 12, 18, 21]

    Les données disponibles par voies orale, inhalatoire et cutanée ne mettent pas en évidence de potentiel cancérogène chez le rat ou la souris.

    Dans une étude récente, des groupes de rats Wistar (50 par groupe et par sexe) ont été exposés aux concen­trations de 0, 100, 400 et 1200 ppm d’acide acrylique dans l’eau de boisson (correspondant respectivement aux doses de 0, 8, 27 et 78 mg/kg/j) pendant 26 mois pour les mâles et 28 mois pour les femelles. Cette modalité de trai­tement a permis d’administrer des doses substantielles d’acide acrylique sans altérer la survie des animaux et a été préférée à une administration quotidienne par gavage qui entraîne des lésions de l’estomac et environ 50 % de mortalité à la dose de 150 mg/kg/j au bout de 3 mois. On a retrouvé dans cette étude bien menée une distribution et une incidence des tumeurs identiques chez les rats témoins et les rats traités, y compris ceux recevant la dose de 78 mg/kg/j qui a été considérée comme la dose jour­nalière maximale tolérée.

    L’application cutanée de 25 µL d’une solution d’acide acry­lique à 1 % dans l’acétone, 3 fois par semaine, pendant la vie entière, n’a pas entraîné le développement de tumeurs de l’épiderme chez la souris C3H. Le badigeonnage réitéré de la peau avec 25 ou 100 µL d’une solution d’acide acry­lique à 1 % dans l’acétone n’a pas induit le développement de tumeurs cutanées ni celui de tumeurs dans d’autres organes chez la souris C3H mâle et la souris ICR des deux sexes. Dans cette dernière étude, l’augmentation signifi­cative de l’incidence des lymphosarcomes chez la souris C3H femelle a été jugée équivoque et n’a pas été confir­mée après réévaluation des résultats.

    On ne dispose que d’une preuve indirecte de l’absence de cancérogénicité expérimentale de l’acide acrylique par inhalation. Elle est fondée sur l’obtention d’une dégéné­rescence de l’épithélium olfactif, sans qu’il y ait dévelop­pement de tumeurs nasales après exposition de rats à des vapeurs d’acrylates de méthyle et butyle aux concentra­tions de 15, 45 et 75 ppm, ou après exposition de rats et de souris à des vapeurs d’acrylate d’éthyle aux concentra­tions de 5, 25 et 75 ppm pendant deux ans. Ces acrylates sont en effet rapidement hydrolysés en acide acrylique et en alcools correspondants dans le tractus respiratoire des rongeurs.

    Effets sur la reproduction [11, 12, 22]

    Une étude par voie orale chez le rat a entrainé une baisse de la fertilité, une baisse du poids corporel et de différents organes chez les nouveau-nés en présence d’une toxicité parentale. Les données disponibles ne mettent pas en évidence d’effets sur le développement.

    Une étude conduite sur une génération chez le rat Fischer 344 exposé aux doses de 83, 250 et 750 mg/kg/j adminis­trées dans l’eau de boisson a révélé à la dose supérieure une baisse de la fertilité des parents et une diminution du poids corporel et de celui de certains organes chez les parents et les nouveau-nés en l’absence de toute lésion histologique. L’action de l’acide acrylique sur la fertilité est jugée équivoque en raison d’une fertilité anormalement basse des animaux témoins dans cette étude et de l’exis­tence d’effets toxiques chez les parents.

    Rien n’indique que l’acide acrylique exerce des effets sur le développement lorsqu’il est administré par des voies per­tinentes. On a rapporté l’absence d’embryotoxicité et de tératogénicité après une exposition maternelle à une concentration atmosphérique de 360 ppm d’acide acry­lique entre le 6e et le 15e jour de la gestation chez le rat ainsi qu’après une exposition maternelle à 225 ppm d’acide acrylique du 6e au 18e jour de la gestation chez le lapin.

  • Toxicité sur l’Homme [4, 23]

    Il existe peu de données concernant les effets sur la santé humaine de l’exposition brève ou prolongée à l’acide acrylique. Cette substance est avant tout un produit corrosif pour la peau et les yeux. L’inhalation des vapeurs entraîne par ailleurs une irritation des voies aéro-digestives. Aucune donnée n’existe sur les effets mutagènes, cancérogènes ou sur la reproduction.

    L’odeur assez forte et désagréable du produit est détectée par certaines personnes à des concentrations faibles; le seuil de perception est de 0,094 ppm mais la majorité des sujets ne le perçoit qu’à partir de 1 ppm.

    Les seuls autres effets rapportés sont quelques réactions allergiques qui sont plutôt de type urticariennes. Ces manifestations sont rares et ont été constatées chez des sujets manipulant des résines acryliques ; les tests réalisés avec l’acide acrylique lui-même sont alors positifs mais la pureté du produit n’a pas été recherchée [24]. Dans deux cas de toxidermie bulleuse, des réactions d’allergie à la fois immédiate et retardée ont été mises en évidence [25].

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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